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Nerf de la guerre, l’oxygène vient cruellement à manquer au fenua. Le niveau de consommation est tel que tous les systèmes de ventilation sont réquisitionnés pour préserver le navire amiral : le CHPF. Afin d’augmenter les rotations de consignes, 100 bouteilles vides ont été acheminées jeudi soir sur le même vol d’Aircalin que les huit professionnels de santé. 144 concentrateurs d’oxygène sont également attendus ce soir sur un vol d’ATN.
Nerf de la guerre, l’oxygène vient cruellement à manquer au fenua. Le niveau de consommation est tel que tous les systèmes de ventilation sont réquisitionnés pour préserver le navire amiral : le CHPF. Afin d’augmenter les rotations de consignes, 100 bouteilles vides ont été acheminées jeudi soir sur le même vol d’Aircalin que les huit professionnels de santé. 144 concentrateurs d’oxygène sont également attendus ce soir sur un vol d’ATN.
Le fenua s’essouffle. Avec plus de 2 800 cas pour 100 000 habitants, l’augmentation du nombre de patients en détresse respiratoire fait fondre les stocks d’oxygène du Pays comme neige au soleil. En lien permanent avec l’Arass et le ministère de la Santé, les prestataires privés de distribution d’oxygène se rassemblent quasi quotidiennement au sein d’une cellule de crise pour coordonner la gestion des stocks et l’approvisionnement d’appareils de ventilation dans tout le pays. Acteurs essentiels dans cette gestion de crise, ce sont eux qui appareillent les patients à domicile afin de leur éviter une évacuation vers l’hôpital, aujourd’hui débordé.
« Ce qu’on livrait en trois mois en temps normal, on doit le faire en une semaine actuellement » rapporte la direction d’Isis Polynésie. C’est qu’en plus des patients habituels non covid, les entreprises de santé à domicile sont aussi sollicitées par les médecins généralistes, habilités depuis l’année dernière à prescrire des concentrateurs d’oxygène à domicile, pour préserver justement le navire amiral : le CHPF. Les autorités sanitaires rapportent ainsi 50 ordonnances par jour. Loin devant les 50 par semaine d’abord estimé par les médecins libéraux. Ces dernière 24 heures, la société Isis a installé l’équivalent de trois mois standards de concentrateurs d’oxygène à domicile. « Notre objectif est de tenir jusqu’à la stabilisation de l’épidémie » explique le responsable. La pression est énorme afin de compenser l’explosivité des cas sur tous les fronts.
Les stocks de l’Agence nationale de santé publique sollicités
Et devant l’afflux intarissable de patients, le CHPF manque d’air lui aussi, notamment pour ses lits de « campagne ». Car si l’hôpital est le seul à être doté de générateurs d’oxygène, la distribution par la tuyauterie ne peut pas alimenter tous les lits, notamment dans les secteurs qui ne sont pas faits pour ça. A l’instar de la nef, dont les lits ne sont pas reliés au circuit. En lien avec l’Arass, la direction a donc fait appel à des concentrateurs d’oxygènes. Ces appareils qui transforment l’air ambiant peuvent insuffler jusqu’à 9 litres par minute. Pratique, mobile et autonome, l’engin viendrait parfaitement soulager le débit d’oxygène de l’hôpital, aujourd’hui en surchauffe. Une tension permanente qui, à la longue, menace l’intégrité du circuit de gaz médical.
Raison de plus pour les autorités sanitaires de « privilégier » ce type d’appareils. Une commande de 144 concentrateurs d’oxygène est d’ailleurs attendue ce samedi soir sur un vol d’ATN. L’oxygène étant au cœur de la prise en charge des patients, le Pays tape maintenant aussi aux portes de la Nouvelle-Zélande ou des Etats-Unis pour en trouver. Les autorités sanitaires ont même prié le haut-commissariat de solliciter les stocks de l’Agence nationale de santé publique, bien que la pénurie en concentrateur d’oxygène gagne également la métropole.
« En fonction de la consommation d’oxygène des patients, on calcule à notre tour les rotations des bouteilles entre Gazpac et le CHPF » 
En attendant des renforts qui tardent, le CHPF s’appuie sur tout ce qu’il peut, y compris sur les bouteilles d’oxygènes. La pharmacie de l’hôpital calcule ainsi scrupuleusement les besoins pour chaque lit armé non relié à la canalisation et pour chaque rotation (remplissage des bouteilles vides et retour des bouteilles pleines). « En fonction de la consommation des patients, on calcule à notre tour les rotations des bouteilles entre Gazpac et le CHPF » indique-t-on du côté des autorités sanitaires. Un partenariat qui intervient dans le cadre d’une convention entre le Pays et Gazpac, seul fabriquant de gaz industriel et pharmaceutique de la Polynésie et de la Calédonie. Financé par le Pays, l’oxygène liquide est ainsi stocké à Motu Uta dans trois cuves d’Isotank, rechargées en Nouvelle-Zélande ou en Nouvelle-Calédonie.
« Sur l’ensemble des quatre hôpitaux, la consommation a été multipliée par dix cette dernière semaine »
Mais les bouteilles vides -notamment les petites recharges B5- viennent aussi à manquer. Notamment du côté des hôpitaux périphériques, dépourvus de générateur d’oxygène (Uturoa, Nuku Hiva, Moorea, Taravao). Et c’est là que ça coince. Elles-mêmes saturées (à l’exception de Nuku Hiva, où 80% de la population est vaccinée), ces structures sont prises d’assaut par des patients Covid dans un état grave. Particulièrement essoufflés, ces malades consomment beaucoup plus d’oxygène. « Il leur faut donc plus de bouteilles par jour, sur l’ensemble des quatre hôpitaux, la consommation a été multiplié par dix cette dernière semaine » signale une technicienne du ministère. Pour honorer la demande et assurer la continuité de l’approvisionnement, l’Arass a commencé à évaluer à la hausse les rotations des Isotank, pour un total de neuf cuves.  
Des rotations que l’agence de régulation cherche aussi à multiplier sur les consignes d’oxygène. D’où l’acheminement de 100 bouteilles vides, jeudi soir, sur le même vol d’Aircalin que les huit professionnels de santé. Une bonne nouvelle pour les autorités sanitaires qui raclent les fonds de tiroir pour trouver des unités supplémentaires, quitte à les requérir chez des anciens patients qui ne s’en servent plus. Des munitions lourdes et difficile à manipuler qu’il faut maintenant envoyer dans les îles dans les plus bref délais. Un casse-tête logistique pour l’agence de régulation de l’offre de soin.
Esther Cunéo, avec Athéna Millecam
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