Deux ans après son sacre aux Bocuse d’Or, Davy Tissot évoque sa nouvelle vie à travers le monde, comme ambassadeur de la gastronomie française. Après sa course aux concours, le Lyonnais se voit désormais du côté de la formation d’excellence en cuisine.
C’est une statue qui a les pieds, bien ancrés. Les pieds sur Terre. De loin, si cette silhouette dorée ressemble à celle des Oscar…il s’agit plutôt de Paul. Le Bocuse d’Or, du nom du pape de la gastronomie lyonnaise et française, est la grande récompense de la discipline. Cette statuette d’or, Davy Tissot la contemple depuis plus d’un an. Le chef de 49 ans a remporté le Bocuse d’Or en septembre 2021, huit ans après la dernière victoire française.
Davy Tissot est le premier Lyonnais à remporter le titre. Un sacre d’autant plus particulier, que la statue est à l’image de son mentor. “Monsieur Paul”, comme il l’appelle, celui qui l’a embauché lorsqu’il avait seize ans. David Tissot a ensuite dirigé l’étoilé lyonnais La Villa Florentine, avant d’être à la tête de Saisons, la table pédagogique de l’Institut Bocuse. La prouesse, c’est que le restaurant d’application a reçu, lui aussi, une étoile. C’est inédit dans l’histoire du guide rouge.
Un an après son sacre aux Bocuse d’Or, que lui évoque cette récompense ? “La plaque en bas, avec mon nom !” En effet, les trois premiers des Bocuse d’Or voient leur victoire inscrite sur le sol de Collonges-au-Mont-d’Or, devant le restaurant de Paul Bocuse, aux deux étoiles Michelin. “C’était beaucoup d’émotions, car c’était ma première maison, explique-t-il. On lève le Bocuse d’Or avec toute l’équipe, et c’est ‘bienvenue à la maison.’”
En quelques mois, Davy Tissot a gagné des allures de rock star de la cuisine française. Lorsqu’il arrive au restaurant Paul Bocuse, en pleine préparation du service du midi, les cuisiniers se bousculent pour l’apercevoir, lui parler et garder un souvenir de cette rencontre. Il raconte, le sourire aux lèvres : “Quand on voit les jeunes qui demandent s’ils peuvent faire une photo, ou bien toucher au Bocuse d’Or, c’est toujours émouvant pour moi.”
Ce totem doré est presque devenu son porte-bonheur. “Je prends le petit-déj tous les matins avec lui”, rit-il. Davy Tissot en avait rêvé, lui qui est originaire du quartier des Minguettes de Vénissieux. Si la statue de Paul Bocuse trône “sur [sa] table dans la cuisine”, le chef garde la tête froide. “Obtenir le Bocuse d’Or, c’était une étape dans une vie professionnelle, rappelle-t-il. Une victoire après 20 ans de travail, 20 ans à observer les autres équipes”.
Avant ce concours, le cuisinier possédait déjà un palmarès de taille. A tout juste 30 ans, Davy Tissot avait remporté l’une des plus grandes reconnaissances de la profession avec le concours des meilleurs ouvriers de France. En 2004, il était alors l’un des plus jeunes à avoir arboré ce col bleu-blanc-rouge. En 2019, il avait également participé une première fois aux Bocuse d’Or, remportant l’édition française, sans parvenir à décrocher le podium européen.
Depuis son sacre, Davy Tissot n’est plus très souvent à Lyon. Sa présence exceptionnelle dans la capitale des Gaules est justifiée par l’édition 2023 des Bocuse d’Or, les 22 et 23 janvier 2023. Le cuisinier enchaîne en effet les voyages. “Avec Monsieur Paul dans les valises”, précise-t-il. Et Davy Tissot ne compte plus les kilomètres : “Mon terrain de jeu avant c’était Lyon, maintenant c’est le monde ! J’ai dû faire le tour de la planète en un an et demi !” Le nouvel ambassadeur de la gastronomie française vient de parcourir les États-Unis mais aussi l’Amérique du Sud et l’Asie, et repartira bientôt en Polynésie. Avec toujours la même ambition : vanter les mérites de la gastronomie française.
Maintenant, il va falloir continuer à travailler pour toujours se remettre en question et faire partie du top de la cuisine à travers le monde. La cuisine bouge, tout le temps en mouvement, et c’est important que nous, cuisiniers français aussi.
Peut-être que la suite se joue du côté des podiums… mais d’une autre manière. “Quand Zizou et Deschamps ont gagné la Coupe du Monde, derrière ils sont passés entraîneurs”, glisse-t-il. La volonté est désormais de former à l’excellence. Davy Tissot détaille : “Je travaille sur le pôle France avec les régions, avec l’État pour créer des équipes junior. Un cursus comme en sport étude à travers les concours, les études mais aussi une formation professionnelle”.
Un centre de formation à l’instar du football, que le Président Emmanuel Macron a nommé lui-même “le Clairefontaine de la gastronomie”. Pour l’instant, la piste d’Ecully est retenue pour installer cette école de cuisine, pâtisserie et sommellerie. Il devrait ouvrir “d’ici un an”. L’ambition est claire pour le titulaire du Bocuse d’Or 2021. “Dans quatre ans, il y a la Coupe du Monde junior, indique-t-il. L’idée c’est qu’il y ait une équipe française. C’est mon objectif”