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Tout au nord de l’île-continent, un lodge chic et un camp de brousse proposent de vivre au plus près de la nature australienne. Une expérience authentique pour un seul et fascinant voyage.
Si l’on se réfère au calendrier aborigène, qui com pte six saisons, c’est Gurrung (septembre), la seconde partie de la saison sèche. Bientôt le redoutable «Build Up», ses nuées de mouches et son insupportable chaleur moite, rendront fou jusqu’au drover (en français, cow-boy) le plus aguerri. Puis viendront les tempêtes et les ciels enragés de décembre… Darwin se souvient encore du cyclone Tracy qui la ravagea le jour de Noël 1974. Plus au sud, Katherine, porte d’entrée de la Terre d’Arnhem, préfère quant à elle oublier la crue du millénaire qui, en 1978, fit de ses rues des toboggans à crocodiles… Mais pour l’heure, le vent souffle du sud-est, sec et chaud, suffisamment agréable pour remplir les terrasses du Wharf. Soucieuse de contenter un flux croissant de visiteurs – le Territoire du Nord reçoit 400.000 voyageurs par an, parmi lesquels 5,9 % de Français -, Darwin a aménagé cette ancienne jetée du port qui aligne bars et restaurants où l’on vient dîner de fruits de mer en jetant un regard faussement décontracté sur le ballet des crocodiles en contrebas. Si l’on y ajoute les sea wasps, minuscules et mortelles méduses qui y pullulent d’octobre à mai, les eaux du nord ne sont décidément pas fréquentables ! Mais qu’importe, nous ne sommes pas venus pour la baignade.

Introduits à la fin du XIXe par les Anglais, les buffles d’Asie se sont acclimatés au bush australien. (Stanislas Fautré/Le Figaro Magazine)
Un Cessna nous a posés à trente-cinq minutes de là sur la piste de latérite de Swim Creek Station, une des plus grandes fermes d’élevage duTop End (l’extrême nord du Territoire du Nord). A la fin du XIXe siècle, tandis que les moutons paissaient déjà sur les terres des infortunés Aborigènes du Sud, les colons traversaient le désert à dos de dromadaire pour rejoindre l’Outback où les attendaient les buffles importés d’Asie via Darwin sur ordre de la Couronne. Son objectif: ancrer la colonie sur la côte nord et couper court aux velléités… françaises, alors bien réelles ! Non loin de l’embouchure de la Mary River, à 5 kilomètres de la mer, l’Australien Charles Carlow a érigé sur une par celle de l’exploitation un lodge dans l’esprit de ceux qu’il a connus dans ses errances africaines, offrant à la région sa première adresse remar quable. Neuf tentes aux allures de trapèze, sur pilotis, une invisible moustiquaire métallique protégeant les hôtes des insectes sans les priver du panorama sur les plaines inondables qui s’étalent à perte de vue. Un monde entre ciel et eau, sanctuaire des magpies, ces oies semi-palmées que les aborigènes d’ici nomment bamurru, d’où le nom du lieu: Bamurru Plains. Les pandanus se déploient en bouquets surréalistes dans le paysage. Termi tières et fourmilières, dressées comme des cathédrales lilliputiennes sous les eucalyptus, parachèvent cette toile insolite. A l’aube, nous embarquons sur l’aéroglisseur du lodge. Fendant les flots dans une envolée d’oies grasses et bavardes, nous filons, casque sur les oreilles, vers le royaume des majestueux paperbarks, arbres à l’écorce comme du papier, particulièrement à l’aise les pieds dans l’eau. Le soleil, en s’élevant, ouvre en corolle les fleurs des nénuphars tandis que, sur leurs feuilles, les frêles jacanas jouent les équilibristes. Sur de rares bancs de terre, les canards siffleurs nous interpellent. Un aigle de mer guette sur son arbre perché. Plus loin, nous verrons le jabiru, gracieux échassier noir et blanc à pattes rouges, le snake bird, cormoran à long cou, et des nuées d’autres fabuleux vola tiles… Cet écosystème est apparu hier dans l’histoire du vénérable continent australien, il y a tout au plus 1500 ans, quand le sel fit place à l’eau douce lors d’un ultime changement climatique.

Vu du ciel, l’escarpement d’Arnhem est le coeur du monde aborigène, un fascinant dédale de roche rouge. (Stanislas Fautré/Le Figaro Magazine)
Il est un lieu où l’homme a fort bien témoigné des évolutions de la nature. A vingt minutes de vol de Bamurru Plains, le Parc national de Kakadu, le plus grand (19 800 km2) de l’île-continent, recèle, à la lisière de l’escarpement de la Terre d’Arnhem, un ensemble inestimable de peintures aborigènes, plus de 5000, dit-on. Certaines dépassent les 20.000 ans, tandis que les scientifiques s’accordent sur le fait que les ancêtres de ces artistes vivaient déjà sur place à l’ère glacière, il y a plus de 50.000 ans. Ce qu’il y a de plus frappant à Kakadu, ce n’est pas tant l’âge de ces fresques que la cosmogonie dont elles tracent les grandes lignes. Le mode de vie qui s’en inspire a perduré, quasi inchangé jusqu’à notre ère, faisant de Kakadu le plus ancien creuset artistique et spirituel de l’humanité. Ainsi, le site de Malangangerr, fréquenté il y a 23.000 ans, le fut-il jusque dans les années 70 !

Au départ de Darwin, un Cessna emmène les hôtes de Bamurru Plains et survole les boucles de la rivière Adélaïde. (Stanislas Fautré/Le Figaro Magazine)
«Les aborigènes ont vécu en nomades sur des terres auxquelles ils étaient viscéralement attachés par des liens mystiques complexes, indissociables de leur environnement, et ce dans une vision circulaire de la vie qui ne nécessitait aucune projection dans le futur.» L’homme qui parle est français. Pour beaucoup, il est François Giner, une énigme, parfois même un fou. Pour une poignée d’autres, il est l’ami fidèle, il est Balang, le frère de peau. Un statut rarement accordé par les aborigènes à ceux qui ne sont pas de pure lignée, métis inclus. Aux liens du sang se superposent dans la culture traditionnelle des attaches mystérieuses, que les lois chantées au Temps du rêve – le Dreamtime, la genèse aborigène – ont fixées, garantes durant des millénaires d’une cohésion sociale exempte de conflits. L’histoire de François Giner débute en 1988 lorsque son parcours d’aventurier le conduit en Terre d’Arnhem au village de Weemol où vit, à plus de 300 kilomètres de Katherine, la communauté Ngkalabon. De sa rencontre avec Georges Balang Jangawanga et sa femme Maggy, naîtra une solide amitié qui aboutira, en 1992, à l’ouverture de Bodeidei Camp, un des rares endroits où le visiteur étranger peut appréhender sans artifice ni faux-semblants la réalité du devenir aborigène et les restes de ce que fut leur univers, avant que les Blancs ne le perturbent à jamais. On y arrive à peine fourbu, transporté par le vieil Oka du camp, un véhicule aux allures de vaisseau lunaire adapté aux aspérités de la piste. On en repart le cœur serré de quitter June, Sabri na, Aiden, Angelina, Terena, femmes et enfants de la communauté qui, jour après jour, emmènent les amis de « Balang » à la découverte d’un monde originel qui s’éteint doucement.
AVANT DE PARTIR

En visite à Bodeidei Camp, Philip «Balang» Mildiwiu est un des derniers détenteurs des traditions de son clan. (Stanislas Fautré/Le Figaro Magazine)
Ambassade d’Australie 4, rue Jean-Rey 75724 Paris Cedex 15 (01.40.59.33.00); www.france.embassy.gov.au). Formalité: visa électronique (ETA) gratuit pour les séjours de moins de 3 mois. Passeport valable 6mois après la date de retour. Monnaie: le dollar australien (1 € = 1,35 AUD). Décalage horaire: d’avril à octobre (la meilleure saison pour la région du Top End) quand il est midi à Paris, il est 19h30 à Darwin. A lire: Le Chant des pistes, de Bruce Chatwin. En terre aborigène. Rencontre avec un monde ancien, de François Giner, réédité chez Albin Michel. A consulter: le guide Lonely Planet, les sites des offices de tourisme de l’Australie (www.australia.com/fr) et du Territoire du Nord (http://fr.travelnt.com).
Y ALLER
Avec Qantas Airways (0.811.980.002; www.qantas.com.au) jusqu’à Singapour, la correspondance sur Darwin est assurée par sa filiale Jetstar. A partir de 1415€ TTC l’aller-retour.
FORFAIT
Spécialiste de la destination, Asia(01.44.41.50.10; www.asia.fr) propose l’Australie sur mesure et adapte ses suggestions aux envies et budgets de chacun: en roue libre pour une première découverte, en VIP sur les sites majeurs de l’île-continent, etc. Ci-dessous, les prix pour Bamurru Plains, Bodeidei Camp et le Blue Mountains Private Safaris correspondent aux modules sur mesure d’Asia.
Y SÉJOURNER
Dans le Top End, Bamurru Plains(00.61.2.9571.6399; www.bamurruplains.com), à partir de 2197€ par personne en tente double, les 2 nuits en Safari Suite incluant la pension complète, certaines activités (dont la croisière en aéroglisseur), l’aller-retour de et vers Darwin en petit avion (35 minutes de vol). Face au bâtiment qui abrite la table d’hôtes, le bar et les profonds canapés en cuir du salon-bibliothèque, une terrasse en teck offre ses espaces ombragés et une petite piscine avec vue sur le bush. Le lodge est fermé de novembre à janvier et ne peut accueillir les enfants de moins de 8 ans. Bodeidei Camp (www. bodeideicamp.fr) à partir de 1846€ par personne le séjour de 3 nuits en tente double et pension complète, transfert en 4×4 de et vers Katherine inclus. 310 kilomètres dont 200 sur la piste ouverte dans les années 70 pour relier la Stuart Highway à la ville minière de Nulhunbuy, 800 kilomètres plus loin sur la côte Est. Camp de brousse confortable (eau chaude, hébergement individuel avec literie sous moustiquaire), cuisine française servie dans une salle agréablement ventilée au milieu de précieux souvenirs, tel le «molo» de David Blanasi, le plus célèbre joueur de didgeridoo. Fresques aborigènes originales, rivière à proximité pour la baignade. Programme variable en fonction des activités de la communauté: promenade jusqu’aux cascades de Kliklimarra, partie de pêche au barramundi, randonnée jusqu’à l’escarpement de Kotpela où l’on admire en privilégié des peintures rarement dévoilées.

Un Wallaby au milieu des termitières. (Stanislas Fautré/Le Figaro Magazine)
Et aussi: mettez le cap sur Sydney et offrez-vous la vue spectaculaire sur le port et l’Opéra (à partir de283€ la nuit en chambre double Deluxe Grand Harbour View) au Shangri-La (00.61.2.9250.6000; www.shangrila.com) avant un ultime bain de nature au cœur des Blue Mountains. A 2heures de route de Sydney, Marc Tickner y a planté son rêve il y a deux ans: le Blue Mountains Privates Safaris (00.61.2.9571.6399; www.blue mountainsprivatessafaris.com). 2 jours/1 nuit à partir de 742€ par personne en pension complète dans ce camp de luxe intime au bord d’une rivière fréquentée par les ornithorynques. On dort dans des «swags», les fameux sacs de couchage de l’Outback, installés sur des plateformes en bois devant un feu de cheminée! Repas en extérieur mais servis avec élégance. Activités: promenade guidée dans le parc pour observer wombats, échidnés, kangourous gris et wallaroos, pêche, balade en canoë, découverte du vignoble… A noter: d’octobre à avril, le camp n’est pas ouvert pour des excursions à la journée (cf. notre bémol!). Comme Bamurru Plains, ce camp de luxe fait partie de la collection Wild Bush Luxury (www.wildbushluxury.com.au).
LE COUP DE COEUR
Aboriginal Fine Art Gallery(00.61.8.8981.1315; www.aaia.com.au). A l’angle des rues Mitchell &Knuckey à Darwin. Ici, on prend le temps de vous initier au didgeridoo, ce fascinant instrument né en Terre d’Arnhem, et de vous parler de l’artiste qui l’a réalisé. Même philosophie à l’étage avec les peintures aborigènes.
L’INSTANT MAGIQUE
Des trois sites peints accessibles au public à Kakadu, celui d’Ubir, près de l’East Alligator River, offre en fin de visite un panorama à 360° qui donne toute la mesure de cet immense parc national classé au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco.
LE BÉMOL
Impossible d’ignorer les problèmes complexes qui asphyxient les groupes aborigènes. Situation parfaitement analysée par François Giner dans son ouvrage. Autre bémol, plus futile: quand la bonne saison commence dans le Top End, elle se termine dans le Sud!

SERVICE

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LA VÉRIFICATION – Considéré comme le moyen de transport collectif le moins polluant, le train génère néanmoins des nuisances dues à la construction et à l’entretien des voies. Des données non prises en compte dans le calcul des émissions de CO2 d’un trajet.
GUIDE – En Bretagne, il y a des dizaines de ports de carte postale… et de magnifiques villages côtiers qui sont aujourd’hui la mémoire vivante de l’histoire maritime de la région.
Une arche de pierre s’est écroulée il y a quelques jours au Tilleul, posant la question de l’accès des touristes à ces plages très fréquentées.
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Australie : la magie du Territoire du Nord

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