L’Institut national d’études démographiques (Ined) est un organisme public de recherche spécialisé dans l’étude des populations, partenaire du monde universitaire et de la recherche au niveau national et à l’international.
Fondé en 1945, l’Ined est devenu en 1986 un Établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST) placé sous la tutelle du Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, du Ministère de la santé et de la prévention et du Ministère des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées L’institut a pour missions d’étudier les populations de la France et des pays étrangers, de diffuser largement les connaissances produites et d’apporter son concours à la formation à la recherche et par la recherche. Par une approche ouverte de la démographie, il mobilise un large éventail de disciplines comme l’économie, l’histoire, la géographie, la sociologie, l’anthropologie, la biologie, l’épidémiologie. Fort de ses équipes de recherche, il encourage les échanges et conduit de nombreux projets de recherche européens ou internationaux.
Depuis 1986, l’Ined fait partie des 8 établissements publics scientifique et technique (EPST), à l’image du CNRS, de l’Inserm ou encore de l’INRA et l’IRD. L’institut a pour missions d’étudier les populations sous tous leurs aspects, de former à la recherche et par la recherche, d’informer les pouvoirs publics et le public sur les questions démographiques et de diffuser les travaux démographiques français à l’international..
Les effectifs de l’Ined rassemblent près de 250 personnes, dont une cinquantaine de chercheurs titulaires, plus d’une quarantaine de doctorants et autant de chercheurs associés. L’institut compte 10 unités de recherche, une unité mixte de service et sept services d’appui à la recherche comme le service Méthodes statistiques et le service des Enquêtes.
L’Ined est doté de plusieurs instances : le conseil scientifique, le conseil d’administration, la commission d’évaluation et d’un comité d’éthique.
L’Ined est l’un des membres fondateurs du Campus Condorcet. Toutes ses équipes sont installées à Aubervilliers et contribuent activement à faire de ce nouveau pôle une référence pour les sciences humaines et sociales, à l’échelle nationale et internationale.
Les travaux de recherche de l’Ined sont en partie financés par les crédits budgétaires de l’établissement. Ils peuvent aussi bénéficier de dotations issues d’agences de financement telle que l’Agence nationale de la recherche (ANR), ou provenant d’organismes publics, de l’industrie ou de programmes européens tels que European Research Council (ERC) et Horizon 2020.
Chaque année, des chercheurs de l’Ined candidatent aux appels à projets lancés par l’Agence nationale de la recherche (ANR).
L’Ined figure parmi les lauréats des Laboratoires d’excellence (Labex), Equipements d’excellence (Equipex), Ecoles universitaires de recherche (EUR) et Institut Convergences. Ces projets, financés par le Programme des investissements d’avenir (PIA), dotent la recherche en sciences de la population d’instruments de financement afin de faire émerger des projets scientifiques ambitieux, capables d’augmenter l’excellence scientifique et la visibilité internationale de la recherche française.
En accord avec la politique d’internationalisation de l’Ined, les équipes de recherche de l’Institut répondent chaque année à des appels à projets internationaux et européens, en lien notamment avec les programme Horizon Europe, Erasmus+ ou encore les Partenariats Hubert Curie. Vous pouvez consulter les projets financés dans le cadre d’appels à projets européens et internationaux dans la rubrique : Appels à projets financés dans le cadre d’appels à projets
Des accords-cadres sont régulièrement signés entre l’Ined et des organismes pour concrétiser l’intérêt et la volonté des chercheurs de l’Ined et de leurs partenaires, établir le cadre de la collaboration et les objectifs scientifiques. Ils formalisent des engagements autour d’activités de recherches, de formation et de valorisation scientifique. Au niveau national, l’Ined renforce également ses liens avec l’enseignement supérieur.
L’Ined se distingue par sa capacité à mener des recherches qui couvrent non seulement la France mais une large partie du monde. Son envergure internationale se reflète dans ses nombreux partenariats à l’étranger et son rôle actif au sein de la communauté scientifique mondiale. L’institut entretient cette culture de la coopération internationale et prend toute sa place dans l’espace européen de la recherche.
L’Ined est un partenaire central dans les grandes initiatives de recherche en démographie européenne. L’institut participe à de nombreux projets financés par l’Union européenne ainsi qu’aux principales initiatives qui rassemblent la communauté des démographes européens.
L’Ined soutient la mobilité internationale des chercheurs, un instrument de formation et de coopération qui participe au renouvellement des problématiques et méthodes de recherche.
Le savoir est fait pour être partagé. L’Ined s’engage dans une politique active visant à promouvoir l’accès aussi ouvert que possible aux données, aux méthodes et aux résultats de la recherche sur la population
A travers sa charte pour la science ouverte, l’Ined promeut un accès aussi ouvert que possible aux données, aux méthodes et aux résultats de la recherche sur la population
Organisme public, l’Ined recrute ses fonctionnaires sur concours, à partir du CAP jusqu’au doctorat. L’Ined fait aussi appel à du personnel en vacation ou en contrats à durée déterminée dans des domaines très variés.
L’Ined recrute sur concours des chercheur-e-s, des ingénieur-e-s et des technicien-ne-s. Retrouvez ici les derniers avis de concours, la présentation des postes à pourvoir et les informations pour déposer sa candidature.
Pour un stage ou un emploi, cette rubrique vous permet d’adresser directement une candidature spontanée à l’Ined.
La recherche à l’Ined s’organise autour d’équipes pluridisciplinaires et thématiques composées de chercheurs titulaires et associés. Elles accueillent des doctorants et des post-doctorants formés à la recherche par la recherche. Plus de 70 projets de recherche pluriannuels sont engagés. Dans le cadre de certains d’entre eux, l’Ined produit ses propres enquêtes, l’une de ses spécificités. L’institut met les données recueillies à disposition de la communauté scientifique.
L’Ined accorde une place croissante à la formation à la recherche par la recherche. Chaque année, l’institut accueille des doctorants, venus de France ou de l’étranger, sélectionnés sur dossiers. Encadrés par un.e chercheur.e, ces étudiants intègrent une ou deux unités de recherche de l’Ined en fonction de leur sujet de thèse. Ils bénéficient ainsi des moyens de travail et de l’environnement stimulant offerts par l’Ined.
L’Ined propose des contrats post-doctoraux, d’un ou deux ans en général, à de jeunes chercheurs, français ou étrangers. Les bénéficiaires sont sélectionnés en fonction de leurs compétences, de la qualité et l’originalité de leur projet de recherche et de son adéquation avec les thématiques de recherche de l’Ined.
L’Ined produit ses propres enquêtes. Les données recueillies sont accessibles à l’ensemble de la communauté scientifique. L’institut possède un service des enquêtes, qui définit les plans de sondage, aide à la conception des questionnaires et l’élaboration des protocoles de collecte, redresse les échantillons statistiques. Il assure ensuite la mise à disposition des bases de données anonymisées. Le catalogue des enquêtes de l’Ined et la présentation des projets en cours peuvent être consultés en ligne.
L’Ined met à disposition des internautes de vastes ressources documentaires sur la population : sa bibliothèque, ouverte à tous et accessible en ligne, et une présentation des méthodes d’analyse statistique et de la méthodologie d’enquête.
La recherche s’appuie sur une palette de méthodes d’analyse statistique qui permettent de décrire et modéliser les événements ou phénomènes démographiques à partir des données recueillies lors des enquêtes. En plus de méthodologies classiques (analyse de données, régressions logistiques…), plusieurs méthodes se sont imposées ces 30 dernières années en démographie. De nombreuses ressources disponibles, notamment de séminaires et de publications, aident à s’informer sur l’utilisation de ces différentes méthodes.
Des séminaires méthodologiques et pratiques en France et à l’Etranger, des articles publiés sur l’utilisation de ces méthodes, des listes de références bibliographiques, voici quelques exemples de ressources statistiques disponibles
Chaque enquête est spécifique. Mais un certain nombre d’étapes sont incontournables. Dès le début, il faut envisager les questions du protocole d’enquête, de la base de sondage, du budget, de la réglementation, des tests, de la constitution de fichiers et de l’étude de la qualité. Au sein de l’Ined, le service des enquêtes et sondages suit la majeure partie des collectes de données requises par les projets de recherche de l’institut. Il accompagne la production des données tout au long du processus ou apporte un soutien ponctuel lors de certaines phases d’enquête.
Les enquêtes de l’Ined répondent chaque fois à une problématique de recherche particulière. Très souvent innovantes, elles sont réalisées «sur mesure». Les choix méthodologiques constituent en eux-mêmes une étape de la recherche. Les temps de la préparation, de la conception des questions et du bilan des enquêtes pilotes ne sont donc pas à sous-estimer, de même que l’étude de la qualité des données collectées.
L’Ined présente ici un ensemble de ressources et de contenus susceptibles d’apporter un éclairage scientifique sur plusieurs grands thèmes faisant parfois écho à l’actualité législative.
Les récentes avancées sociétales et médicales autour des enjeux contemporains de bioéthique ont fait émerger de nombreux sujets de recherche. A l’Ined, plusieurs projets de recherche, des enquêtes, des articles scientifiques contribuent à apporter de nouvelles connaissances sur des sujets comme l’AMP, la GPA, le choix du sexe de l’enfant ou encore la fin de vie.
Les éditions de l’Ined existent depuis la création de l’institut et constituent l’une de ses missions fondamentales de diffusion des savoirs. Elles reflètent et accompagnent la pluridisciplinarité de la sphère démographique par la valorisation de la production scientifique et des résultats d’enquêtes auprès d’un public diversifié, offrant ainsi une expertise scientifique et une connaissance solide au débat public et aux grandes questions de société. L’archive ouverte permet la diffusion élargie des publications en libre accès ainsi que l’archivage pérenne des travaux des chercheurs de l’Ined.
Le service de la Bibliothèque, documentation et archives de l’Ined a rejoint le Grand Équipement Documentaire (GED). Cette grande bibliothèque au service de la recherche en sciences humaines et sociales, rassemble des collections issues de plus de 50 bibliothèques, fonds documentaires et services d’archives.
Un tour du monde et des questions de population : pour comparer les indicateurs démographiques de tous les pays, préparer un cours ou un exposé, trouver des réponses simples, réfléchir à des sujets complexes, s’initier à la démographie, approfondir ses connaissances en s’amusant…
Toute la population en chiffres : retrouvez les données sur la population française et mondiale, présentées sous forme de tableaux, et accédez aux bases de données en ligne.
Les données les plus récentes sur la structure et l’évolution de la population en France sont présentées sous forme de tableaux, réalisés à partir des publications régulières de l’Insee et des estimations et calculs de l’Ined. Les données peuvent aussi être téléchargées sous forme de séries remontant plus loin dans le passé. «Evolution de la population» propose des chiffres sur la « France entière» incluant les DOM. Les autres rubriques concernent la France métropolitaine, pour laquelle les données disponibles sont plus complètes et homogènes sur de longues périodes.
Les tableaux pour la « France entière » regroupent les données sur la France métropolitaine et les quatre départements d’outre-mer (DOM). Ces chiffres n’incluent pas Mayotte, devenue le cinquième département d’outre-mer depuis le 31 mars 2011, ni les autres territoires et collectivités d’outre-mer : Nouvelle Calédonie, Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis et Futuna. L’Insee intègre les DOM dans son bilan démographique annuel et dans une grande majorité des tableaux du volume annuel détaillé sur la situation démographique.
D’abord estimés de manière provisoire, les effectifs de la population par sexe et âge sont ensuite revus par l’Insee, pour l’ensemble du territoire, comme pour les régions et départements ; les recensements permettent par exemple de disposer, pour certaines années, de comptages précis. Les données définitives sont publiées avec un décalage de deux ans.
La population se modifie, d’une année à l’autre, par les mouvements de la population. Le mouvement naturel est la différence entre les naissances et les décès, connus précisément grâce aux bulletins issus de l’enregistrement à l’état civil. Le solde migratoire représente la différence entre les entrées et les sorties ; il est évalué à partir des informations disponibles. Pour garantir la cohérence comptable entre, d’une part, les évolutions de la population entre deux recensements et, d’autre part, les mouvements estimés de la population, il est parfois nécessaire de rajouter un ajustement statistique aux mouvements. Pour estimer l’importance relative des mouvements de population, on les rapporte souvent à la population moyenne de l’année. On obtient ainsi des taux de natalité, de mortalité, de croissance naturelle et de variation totale.
L’enregistrement des naissances à l’état civil donne lieu à des bulletins statistiques qui contiennent de nombreuses informations. On compte donc les naissances selon de nombreuses caractéristiques : situation matrimoniale et nationalité des parents, sexe de l’enfant, grossesses gémellaires, etc. Les informations sur l’âge de la mère permettent de calculer des indicateurs démographiques de fécondité annuels, comme l’indicateur conjoncturel exprimé en nombre d’enfants par femme au cours de la vie. Année après année, on complète également la descendance des générations : par exemple les femmes nées en 1970 ont eu 34 ans en 2004. On sait combien elles ont eu d’enfants avant 34 ans, et l’on peut estimer combien elles auront d’enfants au cours de leur vie.
L’utilisation de la contraception et le recours à l’avortement rendent possible la maîtrise de la fécondité. Les comportements de contraception sont connus grâce à des enquêtes réalisées par l’Ined auprès de l’ensemble des femmes depuis 1978. Les caractéristiques des avortements sont connues à partir des bulletins statistiques d’interruption volontaire de grossesse et des statistiques hospitalières. L’Ined est chargé de la publication de la statistique des bulletins d’interruption de grossesse.
L’enregistrement des mariages à l’état civil permet de compter les mariages selon de nombreuses caractéristiques : situation matrimoniale antérieure de chacun des époux, nationalité, etc. Les statistiques du ministère de la Justice renseignent sur les divorces ainsi que sur les formations et les dissolutions de Pacs.
Les recensements de la population recensent d’abord des logements. Les personnes vivant dans un même logement forment un ménage, chaque ménage regroupant donc l’ensemble des habitants d’un logement. D’après les définitions du recensement, un ménage peut être composé d’une ou plusieurs familles. On appelle famille un groupe de personnes composé soit d’un couple sans enfant, soit d’un couple avec des enfants, soit d’un (seul) adulte et de ses enfants.
L’enregistrement des décès à l’état civil permet de mesurer les variations de la mortalité. Les décès par sexe et âge permettent de calculer des tables de mortalité. Ces tables fournissent l’espérance de vie à la naissance, c’est-à-dire le nombre d’années qu’un nouveau-né pourrait s’attendre à vivre, s’il devait subir toute sa vie les conditions de mortalité observées au cours de l’année. Par ailleurs, la mortalité des enfants de moins d’un an fait l’objet d’un suivi particulier. Les causes de décès sont renseignées par un médecin sur un certificat spécifique de décès et les certificats sont envoyés à l’Inserm qui code les causes de décès.
Deux séries statistiques utilisant des sources différentes sont présentées. L’Insee s’appuie sur l’exploitation des enquêtes annuelles de recensement offrant une vision globale du solde migratoire et des entrées et sorties des personnes non-immigrées ou immigrés (y compris les étrangers en situation irrégulière). L’Ined dénombre plus précisément les admissions au séjour des étrangers non ressortissants de l’Union européenne obtenant un premier titre de séjour d’une durée d’au moins un an (fichier AGDREF, ministère de l’Intérieur).
Les recensements de la population sont l’occasion de compter le nombre d’habitants qui ne sont pas nés sur le territoire. Parmi les personnes nées à l’étranger, on a coutume de distinguer les Français de naissance et les immigrés, nés avec une autre nationalité. On distingue les habitants selon leur nationalité, française ou étrangère, et, parmi les Français, les Français de naissance ou les Français par acquisition. Le recensement permet donc de connaître la nationalité actuelle ainsi que la nationalité à la naissance. Les catégories d’étrangers et d’immigrés sont différentes : les immigrés, « nés étrangers à l’étranger », peuvent être encore étrangers au recensement ou être devenus Français. Les étrangers, quant à eux, peuvent être nés à l’étranger (ils sont alors immigrés) ou nés en France (dans ce cas ils ne sont pas immigrés).
Les tableaux présentent les populations, les naissances et les décès en Europe et dans les pays développés. Ces données sont complétées par des indicateurs : taux de natalité et de mortalité, indicateur conjoncturel de fécondité et espérance de vie à la naissance.
La publication World Population Prospects fournit les estimations de population des Nations unies pour tous les pays du monde pour chaque année entre 1950 et 2020 et les projections selon différents scénarios (bas, moyen et haut) pour chaque année entre 2020 et 2100. Les chiffres présentés ici correspondent aux projections pour l’année en cours selon le scénario moyen.
Toute la population sous vos yeux : un atlas, des cartes interactives, une animation sur les migrations et des graphiques interprétés pour visualiser et comprendre les enjeux et les évolutions démographiques mondiales.
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Mise à jour : janvier 2019, sur la base des estimations de la Population mondiale des Nations Unies
Les “mémos de la démo” offrent un panorama des connaissances sur la population, dans des formats courts et accessibles à tous.
Fiches, analyses et interviews proposent un résumé de l’actualité scientifique, un décryptage des enjeux liés aux questions de population et des outils pédagogiques pour aborder les phénomènes démographiques et leurs évolutions, en France et dans le monde.
602, Juillet-août 2022
https://doi.org/10.3917/popsoc.602.0001
Le niveau d’éducation progresse beaucoup entre les parents immigrés et leurs enfants nés en France. Le niveau atteint reste cependant inférieur à celui des descendants de natifs. Dans les familles originaires d’Asie et d’Afrique subsaharienne, les parents sont plus souvent diplômés du supérieur que les parents natifs. Dans les familles originaires de Turquie et du Moyen-Orient, les parents sont en revanche peu diplômés et leurs enfants aussi malgré une progression, faisant de ce groupe celui le moins diplômé de tous les groupes issus de l’immigration. La plus grande réussite scolaire des filles, un fait général bien connu en France, se vérifie aussi chez les filles d’immigrés qui dépassent plus souvent que les fils le niveau de diplôme des parents.
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Le niveau d’éducation augmente d’une génération à l’autre ; progresse-t-il autant dans les familles issues de l’immigration que dans les autres ? Cris Beauchemin, Mathieu Ichou et Patrick Simon examinent la question en s’appuyant sur la deuxième édition de l’enquête Trajectoires et Origines (TeO2) et analysent les différences de progression au sein des familles selon leur origine géographique et le sexe des enfants.
Les enfants réussissent-ils mieux que leurs parents et leurs ascendants ? Cette question classique des études de mobilité sociale se pose avec une acuité particulière pour les familles d’immigrés, dont le projet migratoire visait souvent à améliorer leur sort et celui de leurs descendants. Or, ce projet se heurte à de nombreux obstacles. Dans quelle mesure les familles issues de l’immigration parviennent-elles à les surmonter au fil des générations ? La deuxième édition de l’enquête Trajectoires et Origines, TeO2 (encadré 1) permet, pour la première fois, de répondre à cette question en mesurant la progression du niveau d’éducation sur trois générations (encadré 2), ainsi que son rendement sur le marché du travail.
Coproduite par l’Ined et l’Insee, l’enquête TeO2 (teo.site.ined.fr), réalisée en 2019-2020, est une réédition de l’enquête TeO1 dont les données avaient été recueillies en 2008-2009. Elle reprend les grands principes de la première édition : 60 % des questions sont identiques et la stratégie d’échantillonnage est similaire [5].
Le champ de l’enquête TeO2 est celui des individus âgés de 18 à 59 ans qui vivent dans un logement ordinaire en France métropolitaine. L’enquête a été effectuée auprès d’environ 27 200 personnes, avec l’objectif de réaliser des analyses fines sur les principaux groupes de population qui ont une expérience directe ou indirecte de la migration vers la France métropolitaine. Les immigrés et les personnes originaires des départements et régions d’outre-mer, ainsi que leurs enfants nés en France métropolitaine, ont donc été surreprésentés. L’échantillon comprend par ailleurs des individus représentatifs du reste de la population. Parmi ces derniers, l’enquête TeO2 permet d’identifier les petits-enfants d’immigrés, une innovation par rapport à l’enquête TeO1 qui permettait déjà de distinguer les rapatriés des anciennes colonies françaises et leurs descendants. Une enquête expérimentale complète l’échantillon de l’enquête principale TeO2 pour augmenter les effectifs des petits-enfants d’immigrés d’origine extra-européenne (enquête complémentaire non utilisée dans cette publication).
Le questionnaire de l’enquête TeO2 renseigne sur l’histoire migratoire des répondants et/ou de leurs parents, décrit leurs parcours scolaires et professionnels, leur histoire familiale, leur vie de couple, leurs enfants, leurs conditions de logement, leur santé, la transmission des langues et de la religion. De façon transversale, il permet d’examiner l’accès des individus aux ressources de la vie sociale (école, travail, logement, services, soins…) ainsi que les discriminations pouvant y faire obstacle.
Pour désigner les personnes en fonction de l’histoire migratoire de leur famille, la sociologie de l’immigration fait couramment usage de la notion de « génération ».
Première génération (G1) : personnes nées à l’étranger, qui n’étaient pas françaises de naissance et sont venues s’installer en France.
Deuxième génération (G2) : personnes nées en France d’au moins un parent immigré. Il s’agit donc de la deuxième génération à vivre sur le territoire français. On désigne ici par G2 les personnes nées en France de deux parents immigrés et par G2,5 les personnes nées en France d’un couple mixte (un parent immigré et un parent né Français).
Troisième génération (G3) : personnes nées en France de parents nés en France, mais ayant au moins un grand-parent immigré.
Le reste de la population réunit des personnes dont les ascendances migratoires peuvent remonter aux arrière-grands-parents ou au-delà. Elles appartiennent au moins à la quatrième génération (G4+), parfois qualifiées par commodité de « descendants de natifs ».
Pour en savoir plus, voir [6].
Précisions méthodologiques :
La liste des pays qui composent chaque groupe est disponible dans le fichier annexe (https://doi.org/10.34847/nkl.af443vty).
Tous les résultats présentés sont pondérés. Ils sont également standardisés selon l’âge : la distribution des âges des répondants des différents groupes est ramenée par pondération à la distribution par âge des descendants de natifs.
Le niveau de diplôme des parents des enquêtés est mesuré par le plus haut diplôme des deux parents.
Au-delà de l’âge de 30 ans, quand les études sont généralement terminées, la progression la plus notable du diplôme s’observe entre les parents immigrés (1re génération ou G1) et leurs enfants nés en France (2e génération ou G2). Dans ces familles, quand on compare le plus haut diplôme des deux parents à celui des enfants, on observe que la proportion de diplômés du supérieur passe de 1 sur 20 à près d’un tiers (figure 1). C’est encore loin des 43 % de diplômés du supérieur que comptent les descendants de natifs (les G4+ dans notre notation, qui n’ont pas d’ascendants immigrés avant la 4e génération). S’en rapprochent cependant les personnes nées en France de couples mixtes (G2,5) avec 41 % de diplômés du supérieur, et les petits-enfants d’au moins un immigré (G3) avec 44 %. Il suffit donc que l’un des parents soit né en France pour que le niveau de diplôme rattrape celui du reste de la population.
Si l’on considère maintenant la « mobilité éducative », c’est-à-dire non plus le taux de diplômés à chaque génération mais la progression effectuée depuis la génération précédente, ce sont les enfants d’immigrés qui accomplissent la distance la plus importante, en raison de la faiblesse du niveau scolaire initial : plus de 70 % obtiennent un diplôme plus élevé que celui de leurs parents (tableau 1). La marge de progression se réduit autour de 55 % quand l’un des parents n’a pas migré ou que la migration des ascendants est plus ancienne.
La génération des enfants a été scolarisée à une période et dans une société où les études supérieures sont plus fréquentes, ce qui explique pour partie ces différences entre générations. Mais la progression intergénérationnelle et la convergence avec les descendants de natifs varient sensiblement selon l’origine des familles.
Un premier profil est celui des familles originaires du Maghreb et d’Europe du Sud (figure 2). Alors que les parents ont très rarement un diplôme du supérieur (moins de 3 %), plus d’un tiers des enfants en possèdent. D’où le pourcentage élevé d’enfants plus diplômés que les parents : respectivement 70 % et 80 % (tableau 1). Cette forte progression en une génération ne s’explique pas seulement par la faible diffusion de l’enseignement supérieur dans les pays d’origine, mais aussi par la forte mobilisation des parents immigrés en faveur de la réussite scolaire des enfants [1]. Le niveau atteint reste cependant en dessous de celui des descendants de natifs (43 %), sauf pour les enfants de couples mixtes. À la troisième génération, les descendants des migrations européennes sont au même niveau que les descendants de natifs (figure 2).
Un deuxième profil est celui des familles originaires d’Afrique hors Maghreb et d’Asie. Les parents sont plus souvent diplômés du supérieur que les parents natifs : un tiers et un quart, respectivement, contre un cinquième. Ces proportions s’élèvent à 40 % en cas de couples mixtes. Ce résultat témoigne d’une évolution des profils des immigrés en France : la diversification des origines s’est accompagnée d’une élévation des niveaux d’instruction, liée à une sélection plus intense des émigrants par rapport à ceux qui restent au pays d’origine [2, 3].
Dans ces conditions, la marge de progression par rapport aux parents est plus réduite (tableau 1). Les enfants de ces familles sont, du reste, plus souvent diplômés du supérieur que les descendants de natifs (43 % contre 50 % parmi les enfants d’un ou deux immigrés d’Afrique, 54 % pour les enfants de deux immigrés d’Asie, et même 64 % pour les enfants de couples mixtes dont un parent vient d’Asie) (figure 2). Si le succès des descendants d’immigrés asiatiques est régulièrement commenté, ce n’est guère le cas pour les descendants d’immigrés africains, en butte aux représentations péjoratives des migrations africaines.
Troisième profil : les familles originaires de Turquie et du Moyen-Orient. Elles combinent un faible taux de diplômés du supérieur chez les parents (5 %) et un taux encore limité chez les enfants (moins de 18 %) (figure 2). Si ces derniers ont souvent progressé par rapport aux parents (deux fois sur trois), ils n’en constituent pas moins le groupe issu de l’immigration le moins diplômé. La trajectoire parcourue ne suffit pas, dans ce cas, à compenser un point de départ très défavorisé.
La plus grande réussite scolaire des filles est un fait général bien connu en France. Elle se vérifie aussi chez les filles d’immigrés (figure 3), qui dépassent plus souvent que les fils le niveau de diplôme des parents (tableau 1). Ces différences de genre dans la mobilité éducative d’une génération à l’autre s’observent de la façon la plus saillante au sein des familles originaires de Turquie ou du Moyen-Orient : 76 % des filles ont un diplôme plus élevé que celui des parents, contre 55 % des garçons. Cet avantage des femmes est légèrement moins marqué au sein des familles issues d’Afrique subsaharienne (57 % des filles sont plus diplômées que leurs parents, contre 43 % des garçons) et du Maghreb (73 % contre 66 %). Si la comparaison s’effectuait avec le parent de même sexe (et non pas avec le diplôme le plus élevé des deux parents, comme c’est le cas ici), le progrès entre les mères (moins diplômées en moyenne que les pères) et les filles serait encore plus spectaculaire.
Au fil des générations, les descendants d’immigrés tendent donc à se rapprocher des niveaux de diplôme des descendants de natifs. Mais à quelles professions conduisent ces diplômes, et en particulier quelle est la part des diplômés du supérieur qui accèdent aux professions intermédiaires ou supérieures (tableau 2) ? Elle s’élève à 77 % pour les descendants de natifs et à 75 % pour les petits-enfants d’immigrés européens. En revanche, les diplômés du supérieur nés d’un ou deux parents d’origine extra-européenne sont nettement moins nombreux à accéder à des professions intermédiaires ou supérieures : 63 % pour les originaires du Maghreb, 67 % pour ceux d’Asie et 71 % pour ceux du reste de l’Afrique. Une part de l’explication de ces écarts selon l’origine tient aux discriminations à l’embauche régulièrement mesurées [4]. Dans tous les groupes, le rendement professionnel d’un diplôme du supérieur est moindre pour les femmes, notamment du fait de leur retrait plus fréquent du marché du travail.
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Les descendants d’immigrés obtiennent des diplômes sensiblement plus élevés que ceux de leurs parents. Malgré cette progression, la deuxième génération ne rejoint pas le niveau des descendants de natifs, notamment chez les enfants d’immigrés originaires d’Europe du Sud, du Maghreb et surtout de Turquie. Le rattrapage s’observe, en revanche, chez les enfants de couples mixtes et parmi la troisième génération issue des migrations européennes. Qu’en sera-t-il des petits-enfants d’immigrés d’origine extra-européenne ? L’enquête TeO2 a tiré un échantillon complémentaire pour cette population. Cet échantillon, ainsi que les informations recueillies sur les diplômes des enfants, permettront de répondre à cette question importante. Il reste que la détention d’un diplôme du supérieur ne garantit pas un accès égal au marché du travail selon l’origine migratoire. La mobilité éducative favorise la mobilité sociale mais ne la garantit pas.
Le niveau d’éducation progresse beaucoup entre les parents immigrés et leurs enfants nés en France. Le niveau atteint reste cependant inférieur à celui des descendants de natifs. Dans les familles originaires d’Asie et d’Afrique subsaharienne, les parents sont plus souvent diplômés du supérieur que les parents natifs. Dans les familles originaires de Turquie et du Moyen-Orient, les parents sont en revanche peu diplômés et leurs enfants aussi malgré une progression, faisant de ce groupe celui le moins diplômé de tous les groupes issus de l’immigration. La plus grande réussite scolaire des filles, un fait général bien connu en France, se vérifie aussi chez les filles d’immigrés qui dépassent plus souvent que les fils le niveau de diplôme des parents.
Cris Beauchemin
Mathieu Ichou
Patrick Simon
L’équipe TeO2
Fichier excel des tableaux et figures (602)
Nomenclature des pays et territoires utilisée dans les analyses
Cris Beauchemin et al., Familles immigrées : le niveau d’éducation progresse sur trois générations mais les inégalités sociales persistent, 2022, Population et Sociétés, n° 602

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