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Grand Calendrier GEO 2023 – Splendides Lointains
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Il y a l’idée que l’on se fait de la Polynésie avant de partir : Gauguin, les lagons couleur du ciel, les perles noires et le monoï… A l’arrivée, surprise, l’image s’ébrèche. Mais, très vite, la magie reprend le dessus.
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Autant le dire tout de suite, le mythe se fait désirer. L’avion qui conduit à Papeete part de Paris à 19 h 10. Il tentera de rattraper le soleil, mais n’y arrivera jamais. Le voyage vers la Polynésie commence donc par une longue nuit de vingt-cinq heures, un jour de nuit en quelque sorte. On a le temps de lire Essai sur l’exotisme, une compilation de notes, intéressantes sur le fond, un peu indigestes sur la forme, rassemblées par Victor Segalen entre 1902 et 1918 et éditées après sa mort. Victor Segalen, né à Brest en 1878, était parti en Polynésie pour y travailler comme médecin. Il est aujourd’hui connu pour avoir été l’un des premiers à poser un regard nouveau sur les civilisations du lointain, à une époque où la pensée dominante évaluait «l’autre», le «différent», le «divers», à l’aune des critères colonialistes européens. Segalen avait adoré la Polynésie et il écrivait, euphorique : «La suite des moments là-bas est presque divine et compose une palette chargée de phosphore et de feux.» Et complétait, dans une lettre à un ami, Henri Manceron, le 23 septembre 1911 : «J’ai eu des réveils à pleurer d’ivresse du jour qui montait.»
En attendant le réveil polynésien, la nuit continue, car il faut s’arrêter à Los Angeles. A priori, une simple escale technique, mais la Homeland Security, la Direction de la sécurité intérieure, s’est mêlée de l’affaire. Elle oblige le voyageur à entrer sur le territoire américain, ce qui au passage coûte quatorze dollars, mais contraint surtout à montrer son passeport, d’abord à un écran tactile, puis à trois douaniers, dont l’un spécialisé dans les ordinateurs portables, le tout en suivant une file d’attente qui sent la sueur et qui s’étire sous un magnifique écran géant où clignote une vidéo pour un parfum. Le tout prend deux heures et demie, sans boire. Le grand théâtre mondial de la sécurité, où une bouteille d’eau est considérée comme une arme de destruction massive.
Arrivée à Papeete, donc, vingt-cinq heures après le départ. Des nuages se sont mis au garde-à-vous pour laisser passer le soleil qui trace un ruban rose sur le lagon. Des musiciens jouent du ukélélé devant la porte d’entrée, un collier de fleurs autour du cou. Un panneau souhaite «maeva», «bienvenue» en tahitien, et quelques passagers pensent que ce mot est une pub pour un club de vacances. L’hôtesse tahitienne d’Air France, qui en a sans doute assez du folklore, a enlevé la robe moulante à fleurs jaunes qu’elle portait dans l’avion et se hâte de rentrer chez elle. «Dépêchez-vous, vous allez tomber en pleine heure de pointe !» lance-t-elle. Se dépêcher ? Heure de pointe ? Dans l’avion, on avait lu Segalen, qui vantait les «masses vertes et les palmes ocreuses, les colonnades arborescentes hissant vers la lumière les efflorescences pressées». Là, pour l’instant, sur la route vers Papeete, ça sent le gasoil à 1,09 euro le litre et les pare-chocs se touchent. Les cocotiers décoiffés ont les cheveux sales. Il y a des graffitis comme à Paris ou à Berlin. On a reculé sa montre de douze heures. Mais les aiguilles sont à la même place qu’en France. A l’envers du décor, c’est un peu le même décor.
Les chiffres, d’ailleurs, ne mettent pas d’humeur dansante. La population s’appauvrit, vieillit, les habitants font un peu moins d’enfants chaque année depuis cinq ans et le taux de chômage est passé de 11,7 % en 2007 à 21,8 % en 2012. Un Polynésien est aujourd’hui, en moyenne et malgré la toujours très conséquente perfusion financière de Paris (32 % du PIB), deux fois moins riche que le «Français moyen». Les démographes disent que l’éden souffre d’un déficit migratoire. En clair, on le quitte davantage (3 650 personnes par an depuis 2007) qu’on ne s’y installe (2 100). Les inégalités se creusent, on voit maintenant des SDF dans les rues de Papeete qui regardent passer des Porsche Cayenne et des Tesla. Et il est assez facile de rencontrer un Chinois qui dit que les «Tahitiens ne travaillent pas» et des Tahitiens qui prétendent que les Chinois «ont tout le business».
Le problème des paradis lointains est là, l’image qu’on s’en fait avant de partir, et qui s’ébrèche à l’arrivée. On emporte dans ses bagages une jolie esthétique de l’exotisme. Un imaginaire, formé dans la sédimentation de clichés. Les femmes de Tahiti, merci Gauguin. Brel qui chantait «Veux-tu que je te dise, Gémir n’est pas de mise, Aux Marquises.» Yves Rocher et Palmolive qui ont mis les lagons et le monoï en shampooings-douches. C’est de leur faute à tous. Dans la file de voitures qui s’étire entre les ronds-points et les trottoirs bancals de Papeete, on peut se consoler en se disant que l’hiatus ne date pas d’aujourd’hui. Segalen avait prévenu : pour les premiers Européens qui arrivèrent à la fin du XVIe siècle en Polynésie, l’image paradisiaque s’était très tôt désolidarisée de la réalité, faite de sacrifices humains et de cannibalisme. Gauguin, lui, avait trouvé une «Polynésie exsangue, coupée de sa culture, détruite par la civilisation européenne». Matisse aussi, qui avait rêvé d’aller découvrir la lumière de l’autre côté de l’équateur, a trouvé, à son arrivée en 1930, Tahiti «décevant». Le voyageur, d’aujourd’hui comme d’hier, est contraint de voir le réel écorner l’imaginaire qu’il s’est construit. Après tout, n’est-ce pas normal, la connaissance est toujours l’éclipse du rêve. «Les raies ? Pfff… Ils les mettent là pour les touristes», siffle, dépitée, cette métropolitaine de passage, qui revient d’une plongée dans le lagon de Moorea.
Aux quêteurs de lointain qui craignent de se heurter au miroir du réel, Segalen proposait un antidote. Il recommandait de «dépouiller l’exotisme de ce qu’il a de géographique. […] De jeter par-dessus bord ses oripeaux primaires : le palmier, les peaux noires, le soleil jaune.» Au premier abord, on se dit qu’il avait, hélas !, encore raison. Après Papeete, le long des premiers «PK» (points kilométriques) de la route, unique, qui fait le tour de l’île principale, les scooters roulent comme à Paris ou à Hanoï, les entrepôts et les enseignes donnent au décor un air banal de zone industrielle, où quelques chiens errants et des coqs trop fiers semblent aller à la rencontre de leurs derniers instants. On en vient à détester notre siècle, qui apporte aux antipodes du monde les mêmes voitures, les mêmes restaurants, les mêmes virus. La 4G arrive, super, on va pouvoir chasser les Pokémon…
Ce n’est qu’à hauteur du PK 20 que l’île, soudain, se défait de ses habits de vieille dame mondialisée. Là, la forêt vous saute dessus. Le vieux volcan dévoile ses formes dans le ciel. Tahiti vous happe dans son vrai relief, celui des îles dites «hautes», par opposition aux atolls, les «basses», où les cratères et les monts ont été mangés par les siècles. Au début, on n’aperçoit qu’une grande masse de vert, d’où dépassent quelques cocotiers effrontés qui sont allés chercher le soleil plus haut que les fougères. Puis, peu à peu, les grandes falaises se dévoilent. On s’arrête, assommé. On pensait rencontrer la douceur des bleus, et c’est la déferlante des verts. Il y a des bananiers, des avocatiers, des pamplemoussiers, des pommiers de Cythère, des plantains de montagne, des caoutchoutiers et des centaines d’espèces végétales (environ 900). Sur ce rideau vigoureux, la nature a tracé quelques minces cascades tendues comme des fils d’argent.
Les sommets sont élevés, 2 241 mètres pour le mont Orohena, et étouffés par des barres de nuages qui s’accrochent dans les ravines et que le vent fait tourner au vert-de-gris. Il y a tant de vert que Gauguin avait fini par peindre un tableau, Le Gué, où le cheval est vert. Et cette avalanche de verts vient s’affaler jusqu’à la limite de la route, où elle s’arrête soudain, devant plus forte qu’elle : l’océan. Côté lagon, celui-ci s’est déguisé en lac, immobile, presque anesthésié, qui vient poser son clapot timide sur la route. De l’autre, sur la côte au vent, il s’affranchit de la tutelle du corail. La roche noire et coupante ouvre là ses mâchoires sur le large, qui dévorent l’écume et la rejettent à la mer dans d’amples rigoles ronflantes. Des enfants viennent, après l’école, prendre leur cours de surf et se laissent enrober par les vagues. On verra une baleine faire le poirier dans la baie de Matavai, comme en 1769, quand James Cook débarqua en ces lieux. Pas de requins méchants, l’eau est lourde et douce, le ciel se maquille de miel. Matisse disait qu’il y a des peintres à Tahiti qui peignent le coucher de soleil sur Moorea. Et ils ne peignent que cela, toute leur vie.
Et voilà installé le décor, la scène fantastique. La route va jusqu’à Teahupoo, où commence un chemin de sable noir que des caoutchoutiers ont décidé de manger. Les surfeurs, des cadors cette fois, sont venus, «faire» la vague. Aujourd’hui, elle est naine, 1,3 mètre à peine, aucun intérêt. L’Espagnol qui est arrivé hier est déçu, il attendra demain pour aller s’enrouler dans le bigoudi turquoise. «En vingt ans, le pays a changé, certes ! s’exclame Olivier de Kersauson. Mais bien moins que moi. Le décor, lui, est toujours aussi beau.» Ce navigateur célèbre en a vu des décors. Les océans, en solitaire, et tous leurs rugissants. Il a aujourd’hui 72 ans, il a construit une maison à Tahiti et prend la mer pour aller pêcher le thazard et l’espadon. Les îles de Polynésie, il les a toutes stockées, en cartes, dans son ordinateur étanche. Les hautes, avec leurs à-pics vertigineux. Les basses, avec leurs couronnes de corail, hypnotisantes et vicieuses. Pour y entrer et sortir, en effet, l’eau, poussée et tirée par les marées, traverse une passe et y prend une vitesse qui rend la navigation (la plongée aussi) périlleuse, mortelle. Conseil d’amiral : éviter d’y traîner quand le courant sort. Y entrer toujours le soleil dans le dos. Et, le plus souvent, se tenir à l’écart. Les cartes marines n’ont pas enregistré les anneaux de corail avec précision, et le récif, quand on le voit, c’est trop tard, c’est qu’on est dessus, alors le corail déchire les coques comme un requin les chairs. En mer, en montagne, en amour aussi, il y a des beautés où le diable aime à se cacher. Mais, quelles beautés ! «Dans le monde marin, tant que vous n’avez pas vu la Polynésie, vous ne pouvez pas parler, dit Kersauson. Les Antilles, à côté, c’est la banlieue nord.»
Olivier de Kersauson s’est marié à Fakarava. Le curé a donné la bénédiction les pieds dans le lagon. Il y a eu une photo dans Paris Match en 2014. Mais depuis, là-bas, il ne s’est pas passé grand-chose. Fakarava est l’une des soixante-seize poussières de l’archipel des Tuamotu. Des petites méduses argentées qui semblent dériver dans un continent à taille d’Europe. 1 500 personnes vivent ici. Le lagon est turquoise comme dans les calendriers. Un homme à vélo passe devant une cabine France Télécom (qui fonctionne). Le gouvernement a promis l’ADSL dans quelques semaines. Depuis que Magellan est venu en 1521, et Bougainville en 1768, on a aussi construit une piste d’atterrissage et placé des anneaux de métal autour des troncs des cocotiers pour que les rats et les crabes ne montent pas manger les noix. Mais à part ça ?
Le porche de l’église Saint-Jean-de-la-Croix ouvre sur quelques marches qui descendent à fleur de lagon. L’aileron d’un requin découpe l’eau. Et on se dit que Saint- Jean-de-la-Croix est l’église du monde la plus proche du paradis. A l’intérieur, le plafond est bleu, et de longs colliers de coquillages pendent entre les piliers jaunes. La Vierge, au fond, est posée sur un pan de coquillages nacrés. Le Vatican est loin, les dogmes chrétiens importés par les missionnaires jadis se sont dissous dans les siècles et le syncrétisme.
Une jeune femme ramasse par terre une fleur de tiaré, qu’elle enfile à l’oreille. Gauguin a peint un tableau qui ressemble un peu à cela, Vahiné no te tiaré, où la femme «avait une fleur à l’oreille qui écoutait son parfum». Il la voyait «d’harmonie raphaélique dans la rencontre des courbes, de la bouche modelée par un sculpteur parlant toutes les langues du langage et du baiser». Il avait baptisé sa maison aux Marquises la Maison du jouir… Comment dessinerait-il, aujourd’hui, les silhouettes ambrées qu’il verrait passer ? Un coup d’œil aux chiffres officiels plonge dans l’accablement. Taux d’obésité des femmes, 55 %, des hommes, 38 % (15,8 % et 15,6 % pour la moyenne française), en progression forte depuis 2000, surtout celui des femmes. Population en surpoids : 70 %. «Les hommes politiques passent leur temps à se lamenter des conséquences des essais nucléaires, mais le problème de santé publique numéro 1 aujourd’hui, c’est le surpoids», déplore cette mère de famille qui accompagne ses enfants au surf. Les causes sont multiples : un facteur génétique propre aux populations polynésiennes ; le passage, depuis trente ans, d’une économie agricole à une économie tertiaire artificiellement soutenue par l’argent français ; et l’abus de sodas et de plats surgelés. A Rikitea, sur la porte de l’école, une grande affiche rose avertit des dangers. Un verre de Coca classique égale huit cuillerées de sucre, une glace, cinq, une noix de coco, une seule. Devant la mairie, on peut consulter une offre d’emploi pour un poste d’agent d’entretien. Principal critère d’embauche : «Etre né aux Marquises ou aux Tuamotu.» Second critère : «Avoir un poids en rapport avec la taille : 1,80 mètre pour 90 kilos environ.» En France, la loi pénalise pourtant vingt facteurs de discrimination, dont l’origine (le premier) et l’apparence physique (le dix-septième). Remarquez, pas loin, aux îles Samoa, la compagnie aérienne locale ne s’embarrasse pas de principes. Bienvenue sur Samoa Air, dit son slogan, «la compagnie où vous payez en fonction de votre poids». Même pas peur.
On quitte Fakarava, car toujours l’étranger repart. On vient aux îles, on y revient rarement, le Polynésien le sait. Il saluera donc, accueillera, cordial, souriant, mais au fond peu lui importe. L’étranger passe, tout passe. Seule compte la terre qui, elle, reste, et encore… La terre, le pays, le fenua. «Nous étions trente avocats à Tahiti quand je suis arrivé en 2004, explique l’un d’entre eux. Aujourd’hui, nous sommes plus d’une centaine. Ce nombre – conséquent au regard de la population – est en partie dû aux nombreuses “affaires de terres”, les conflits de revendications de propriétés.» Car la terre, donc, le fenua, on y tient, on s’y accroche. L’éphémère, on s’en détache. «Aita pea pea», diton. Le dicton polynésien le plus connu. «Cela n’a pas d’importance », «ce n’est pas grave, pourquoi se faire du souci»… Gauguin, déjà, écrivait dans Noa Noa : «Je commence à penser simplement […], je fonctionne animalement, librement, avec la certitude du lendemain pareil au jour présent.» Montesquieu avait prévenu : la géographie et le climat dictent les caractères des peuples. Dans les îles de Polynésie, les saisons se ressemblent, les nuits et les jours se succèdent, semblables, le sentiment émerge que le temps ne se divise plus en heures ou en jours, il épouse l’éternité. Est-ce l’océan qui l’avale, comme il avale l’espace ? Les îles ancrées dans le corail, les volcans figés qui ne rugissent plus ? Au fond, en Polynésie, qu’est-ce qui change vraiment ? Les écarts de richesse s’accentuent, le chômage augmente, le trafic de paka (le nom local du cannabis), l’insécurité aussi. Matisse, peut-être, ne pourrait plus dire : «Voler une bicyclette, à quoi bon ? Où aller avec ?»
Et alors ? La joie de vivre, elle, demeure, tout le monde vous le dira, le sentiment que le lendemain de toute façon prendra soin de lui-même… Le conseil des ministres du 6 novembre a accordé une subvention de 239 800 francs Pacifique (2 000 euros) à l’association des piroguiers de Taiarapu-Pueu. Et autorisé la pêche aux trocas, des coquillages qui servent à fabriquer des boutons de chemise. Au fond, ici, on ne sait même pas vraiment combien d’îles il y a. L’Insee Polynésie en dénombre 121, l’Institut d’émission d’Outre-Mer, 118. «Aita pea pea…»
Alors, on va au bout. Au bout de cette antichambre de l’éternité. Sur l’archipel le plus oriental, les Gambier. En bateau, depuis Papeete, cela prendra une semaine. On entendra un océan de houle lourde et profonde secouer la nuit dans un ronflement d’ogre. On verra des atolls surgir aux matins jaunes, avec des noms à faire rire les mouettes, Nengo Nengo, Puka Puka. Des passagers diront que les Polynésiens jadis étaient de sacrés marins, qui savaient guider leurs pirogues aux étoiles. Un marin répondra qu’il y a une part de légende et que, sans doute, beaucoup de pirogues gisent là, par 3 000 mètres de fond. A Rikitea, au sommet du mont Duff, on ne voudra plus redescendre tellement c’est beau. A Akamaru, on marchera vers l’église Notre-Dame-de-la-Paix au bout d’une pelouse belle comme en Angleterre, et peignée par une poignée de familles. Celles-ci chanteront, et un visiteur dira que c’est «à chialer d’émotion». D’ailleurs, il pleuvra et la mer restera turquoise. De toutes façons, après une semaine en Polynésie, on ne peut plus voir le monde qu’en couleur. La nuit venue, avec un peu de chance, sous la pleine lune, on verra les étoiles se trémousser dans les roulis. Dans ce soleil de minuit des mers du Sud, on aura le temps de se plonger dans le genre de livre qu’on ne lit jamais, un livre de peintre, Gauguin, Avant et Après. On espérera la baleine et le dauphin, aucun ne viendra, seule une sterne perdue volera à l’envers vers l’île de Pâques. On se dira que Paris est si loin, à 15 000 kilomètres, et qu’il y en a encore autant jusqu’au pôle Sud, que la terre est immense surtout quand elle ne fait qu’un avec le ciel.
Gauguin n’était pas venu jusqu’ici, mais il l’avait senti depuis sa terrasse, aux Marquises : «Mes yeux voient sans comprendre l’espace devant moi ; et j’ai la sensation du sans fin, dont je suis le commencement.»
Fiu : pas besoin de rester longtemps à Tahiti pour entendre ce mot. Comme dans la phrase «je suis fiu», c’est-à-dire «j’en ai marre». Le Polynésien, enthousiaste souvent, peut devenir fiu d’une seconde à l’autre. Il lâche tout, alors. Embêtant lorsque c’est votre serveur au restau. Ou la vahiné de vos rêves.
Moana : signifie «la mer», «l’océan». C’est aussi un prénom. Le mot est assez œcuménique puisqu’il a donné son nom à la fois à un chic bateau de croisière qui va à Bora Bora et à un syndicat local. La mer, ici, c’est la mère de tout.
Fenua : quand un Polynésien parle de son fenua, il désigne la terre, le pays, voire l’île qu’il habite. Dans la presse locale, le mot est utilisé comme un synonyme de Polynésie. Un terme qui traduit l’ancrage très fort au territoire. Dans les îles, tout passe, sauf la terre…
Mana : avoir du mana, c’est être habité, avoir du charisme. Voire, un pouvoir sacré, surnaturel. Il y a le bon mana (la puissance vitale, l’esprit presque magique du chef). Mais aussi le mauvais mana, le moki. On peut, enfin, retirer son mana à quelqu’un, lui enlever son pouvoir.
Cet article est tiré du magazine GEO n°455 (janvier 2017)
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