L’Institut national d’études démographiques (Ined) est un organisme public de recherche spécialisé dans l’étude des populations, partenaire du monde universitaire et de la recherche au niveau national et à l’international.
Fondé en 1945, l’Ined est devenu en 1986 un Établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST) placé sous la tutelle du Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, du Ministère de la santé et de la prévention et du Ministère des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées L’institut a pour missions d’étudier les populations de la France et des pays étrangers, de diffuser largement les connaissances produites et d’apporter son concours à la formation à la recherche et par la recherche. Par une approche ouverte de la démographie, il mobilise un large éventail de disciplines comme l’économie, l’histoire, la géographie, la sociologie, l’anthropologie, la biologie, l’épidémiologie. Fort de ses équipes de recherche, il encourage les échanges et conduit de nombreux projets de recherche européens ou internationaux.
Depuis 1986, l’Ined fait partie des 8 établissements publics scientifique et technique (EPST), à l’image du CNRS, de l’Inserm ou encore de l’INRA et l’IRD. L’institut a pour missions d’étudier les populations sous tous leurs aspects, de former à la recherche et par la recherche, d’informer les pouvoirs publics et le public sur les questions démographiques et de diffuser les travaux démographiques français à l’international..
Les effectifs de l’Ined rassemblent près de 250 personnes, dont une cinquantaine de chercheurs titulaires, plus d’une quarantaine de doctorants et autant de chercheurs associés. L’institut compte 10 unités de recherche, une unité mixte de service et sept services d’appui à la recherche comme le service Méthodes statistiques et le service des Enquêtes.
L’Ined est doté de plusieurs instances : le conseil scientifique, le conseil d’administration, la commission d’évaluation et d’un comité d’éthique.
L’Ined est l’un des membres fondateurs du Campus Condorcet. Toutes ses équipes sont installées à Aubervilliers et contribuent activement à faire de ce nouveau pôle une référence pour les sciences humaines et sociales, à l’échelle nationale et internationale.
Les travaux de recherche de l’Ined sont en partie financés par les crédits budgétaires de l’établissement. Ils peuvent aussi bénéficier de dotations issues d’agences de financement telle que l’Agence nationale de la recherche (ANR), ou provenant d’organismes publics, de l’industrie ou de programmes européens tels que European Research Council (ERC) et Horizon 2020.
Chaque année, des chercheurs de l’Ined candidatent aux appels à projets lancés par l’Agence nationale de la recherche (ANR).
L’Ined figure parmi les lauréats des Laboratoires d’excellence (Labex), Equipements d’excellence (Equipex), Ecoles universitaires de recherche (EUR) et Institut Convergences. Ces projets, financés par le Programme des investissements d’avenir (PIA), dotent la recherche en sciences de la population d’instruments de financement afin de faire émerger des projets scientifiques ambitieux, capables d’augmenter l’excellence scientifique et la visibilité internationale de la recherche française.
En accord avec la politique d’internationalisation de l’Ined, les équipes de recherche de l’Institut répondent chaque année à des appels à projets internationaux et européens, en lien notamment avec les programme Horizon Europe, Erasmus+ ou encore les Partenariats Hubert Curie. Vous pouvez consulter les projets financés dans le cadre d’appels à projets européens et internationaux dans la rubrique : Appels à projets financés dans le cadre d’appels à projets
Des accords-cadres sont régulièrement signés entre l’Ined et des organismes pour concrétiser l’intérêt et la volonté des chercheurs de l’Ined et de leurs partenaires, établir le cadre de la collaboration et les objectifs scientifiques. Ils formalisent des engagements autour d’activités de recherches, de formation et de valorisation scientifique. Au niveau national, l’Ined renforce également ses liens avec l’enseignement supérieur.
L’Ined se distingue par sa capacité à mener des recherches qui couvrent non seulement la France mais une large partie du monde. Son envergure internationale se reflète dans ses nombreux partenariats à l’étranger et son rôle actif au sein de la communauté scientifique mondiale. L’institut entretient cette culture de la coopération internationale et prend toute sa place dans l’espace européen de la recherche.
L’Ined est un partenaire central dans les grandes initiatives de recherche en démographie européenne. L’institut participe à de nombreux projets financés par l’Union européenne ainsi qu’aux principales initiatives qui rassemblent la communauté des démographes européens.
L’Ined soutient la mobilité internationale des chercheurs, un instrument de formation et de coopération qui participe au renouvellement des problématiques et méthodes de recherche.
Le savoir est fait pour être partagé. L’Ined s’engage dans une politique active visant à promouvoir l’accès aussi ouvert que possible aux données, aux méthodes et aux résultats de la recherche sur la population
A travers sa charte pour la science ouverte, l’Ined promeut un accès aussi ouvert que possible aux données, aux méthodes et aux résultats de la recherche sur la population
Organisme public, l’Ined recrute ses fonctionnaires sur concours, à partir du CAP jusqu’au doctorat. L’Ined fait aussi appel à du personnel en vacation ou en contrats à durée déterminée dans des domaines très variés.
L’Ined recrute sur concours des chercheur-e-s, des ingénieur-e-s et des technicien-ne-s. Retrouvez ici les derniers avis de concours, la présentation des postes à pourvoir et les informations pour déposer sa candidature.
Pour un stage ou un emploi, cette rubrique vous permet d’adresser directement une candidature spontanée à l’Ined.
La recherche à l’Ined s’organise autour d’équipes pluridisciplinaires et thématiques composées de chercheurs titulaires et associés. Elles accueillent des doctorants et des post-doctorants formés à la recherche par la recherche. Plus de 70 projets de recherche pluriannuels sont engagés. Dans le cadre de certains d’entre eux, l’Ined produit ses propres enquêtes, l’une de ses spécificités. L’institut met les données recueillies à disposition de la communauté scientifique.
L’Ined accorde une place croissante à la formation à la recherche par la recherche. Chaque année, l’institut accueille des doctorants, venus de France ou de l’étranger, sélectionnés sur dossiers. Encadrés par un.e chercheur.e, ces étudiants intègrent une ou deux unités de recherche de l’Ined en fonction de leur sujet de thèse. Ils bénéficient ainsi des moyens de travail et de l’environnement stimulant offerts par l’Ined.
L’Ined propose des contrats post-doctoraux, d’un ou deux ans en général, à de jeunes chercheurs, français ou étrangers. Les bénéficiaires sont sélectionnés en fonction de leurs compétences, de la qualité et l’originalité de leur projet de recherche et de son adéquation avec les thématiques de recherche de l’Ined.
L’Ined produit ses propres enquêtes. Les données recueillies sont accessibles à l’ensemble de la communauté scientifique. L’institut possède un service des enquêtes, qui définit les plans de sondage, aide à la conception des questionnaires et l’élaboration des protocoles de collecte, redresse les échantillons statistiques. Il assure ensuite la mise à disposition des bases de données anonymisées. Le catalogue des enquêtes de l’Ined et la présentation des projets en cours peuvent être consultés en ligne.
L’Ined met à disposition des internautes de vastes ressources documentaires sur la population : sa bibliothèque, ouverte à tous et accessible en ligne, et une présentation des méthodes d’analyse statistique et de la méthodologie d’enquête.
La recherche s’appuie sur une palette de méthodes d’analyse statistique qui permettent de décrire et modéliser les événements ou phénomènes démographiques à partir des données recueillies lors des enquêtes. En plus de méthodologies classiques (analyse de données, régressions logistiques…), plusieurs méthodes se sont imposées ces 30 dernières années en démographie. De nombreuses ressources disponibles, notamment de séminaires et de publications, aident à s’informer sur l’utilisation de ces différentes méthodes.
Des séminaires méthodologiques et pratiques en France et à l’Etranger, des articles publiés sur l’utilisation de ces méthodes, des listes de références bibliographiques, voici quelques exemples de ressources statistiques disponibles
Chaque enquête est spécifique. Mais un certain nombre d’étapes sont incontournables. Dès le début, il faut envisager les questions du protocole d’enquête, de la base de sondage, du budget, de la réglementation, des tests, de la constitution de fichiers et de l’étude de la qualité. Au sein de l’Ined, le service des enquêtes et sondages suit la majeure partie des collectes de données requises par les projets de recherche de l’institut. Il accompagne la production des données tout au long du processus ou apporte un soutien ponctuel lors de certaines phases d’enquête.
Les enquêtes de l’Ined répondent chaque fois à une problématique de recherche particulière. Très souvent innovantes, elles sont réalisées «sur mesure». Les choix méthodologiques constituent en eux-mêmes une étape de la recherche. Les temps de la préparation, de la conception des questions et du bilan des enquêtes pilotes ne sont donc pas à sous-estimer, de même que l’étude de la qualité des données collectées.
L’Ined présente ici un ensemble de ressources et de contenus susceptibles d’apporter un éclairage scientifique sur plusieurs grands thèmes faisant parfois écho à l’actualité législative.
Les récentes avancées sociétales et médicales autour des enjeux contemporains de bioéthique ont fait émerger de nombreux sujets de recherche. A l’Ined, plusieurs projets de recherche, des enquêtes, des articles scientifiques contribuent à apporter de nouvelles connaissances sur des sujets comme l’AMP, la GPA, le choix du sexe de l’enfant ou encore la fin de vie.
Les éditions de l’Ined existent depuis la création de l’institut et constituent l’une de ses missions fondamentales de diffusion des savoirs. Elles reflètent et accompagnent la pluridisciplinarité de la sphère démographique par la valorisation de la production scientifique et des résultats d’enquêtes auprès d’un public diversifié, offrant ainsi une expertise scientifique et une connaissance solide au débat public et aux grandes questions de société. L’archive ouverte permet la diffusion élargie des publications en libre accès ainsi que l’archivage pérenne des travaux des chercheurs de l’Ined.
Le service de la Bibliothèque, documentation et archives de l’Ined a rejoint le Grand Équipement Documentaire (GED). Cette grande bibliothèque au service de la recherche en sciences humaines et sociales, rassemble des collections issues de plus de 50 bibliothèques, fonds documentaires et services d’archives.
Un tour du monde et des questions de population :
pour comparer les indicateurs démographiques de tous les pays,
préparer un cours ou un exposé,
trouver des réponses simples,
réfléchir à des sujets complexes,
s’initier à la démographie,
approfondir ses connaissances en s’amusant…
Toute la population en chiffres : retrouvez les données sur la population française et mondiale, présentées sous forme de tableaux, et accédez aux bases de données en ligne.
Les données les plus récentes sur la structure et l’évolution de la population en France sont présentées sous forme de tableaux, réalisés à partir des publications régulières de l’Insee et des estimations et calculs de l’Ined. Les données peuvent aussi être téléchargées sous forme de séries remontant plus loin dans le passé. «Evolution de la population» propose des chiffres sur la « France entière» incluant les DOM. Les autres rubriques concernent la France métropolitaine, pour laquelle les données disponibles sont plus complètes et homogènes sur de longues périodes.
Les tableaux pour la « France entière » regroupent les données sur la France métropolitaine et les quatre départements d’outre-mer (DOM). Ces chiffres n’incluent pas Mayotte, devenue le cinquième département d’outre-mer depuis le 31 mars 2011, ni les autres territoires et collectivités d’outre-mer : Nouvelle Calédonie, Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis et Futuna. L’Insee intègre les DOM dans son bilan démographique annuel et dans une grande majorité des tableaux du volume annuel détaillé sur la situation démographique.
D’abord estimés de manière provisoire, les effectifs de la population par sexe et âge sont ensuite revus par l’Insee, pour l’ensemble du territoire, comme pour les régions et départements ; les recensements permettent par exemple de disposer, pour certaines années, de comptages précis. Les données définitives sont publiées avec un décalage de deux ans.
La population se modifie, d’une année à l’autre, par les mouvements de la population. Le mouvement naturel est la différence entre les naissances et les décès, connus précisément grâce aux bulletins issus de l’enregistrement à l’état civil. Le solde migratoire représente la différence entre les entrées et les sorties ; il est évalué à partir des informations disponibles. Pour garantir la cohérence comptable entre, d’une part, les évolutions de la population entre deux recensements et, d’autre part, les mouvements estimés de la population, il est parfois nécessaire de rajouter un ajustement statistique aux mouvements. Pour estimer l’importance relative des mouvements de population, on les rapporte souvent à la population moyenne de l’année. On obtient ainsi des taux de natalité, de mortalité, de croissance naturelle et de variation totale.
L’enregistrement des naissances à l’état civil donne lieu à des bulletins statistiques qui contiennent de nombreuses informations. On compte donc les naissances selon de nombreuses caractéristiques : situation matrimoniale et nationalité des parents, sexe de l’enfant, grossesses gémellaires, etc. Les informations sur l’âge de la mère permettent de calculer des indicateurs démographiques de fécondité annuels, comme l’indicateur conjoncturel exprimé en nombre d’enfants par femme au cours de la vie. Année après année, on complète également la descendance des générations : par exemple les femmes nées en 1970 ont eu 34 ans en 2004. On sait combien elles ont eu d’enfants avant 34 ans, et l’on peut estimer combien elles auront d’enfants au cours de leur vie.
L’utilisation de la contraception et le recours à l’avortement rendent possible la maîtrise de la fécondité. Les comportements de contraception sont connus grâce à des enquêtes réalisées par l’Ined auprès de l’ensemble des femmes depuis 1978. Les caractéristiques des avortements sont connues à partir des bulletins statistiques d’interruption volontaire de grossesse et des statistiques hospitalières. L’Ined est chargé de la publication de la statistique des bulletins d’interruption de grossesse.
L’enregistrement des mariages à l’état civil permet de compter les mariages selon de nombreuses caractéristiques : situation matrimoniale antérieure de chacun des époux, nationalité, etc. Les statistiques du ministère de la Justice renseignent sur les divorces ainsi que sur les formations et les dissolutions de Pacs.
Les recensements de la population recensent d’abord des logements. Les personnes vivant dans un même logement forment un ménage, chaque ménage regroupant donc l’ensemble des habitants d’un logement. D’après les définitions du recensement, un ménage peut être composé d’une ou plusieurs familles. On appelle famille un groupe de personnes composé soit d’un couple sans enfant, soit d’un couple avec des enfants, soit d’un (seul) adulte et de ses enfants.
L’enregistrement des décès à l’état civil permet de mesurer les variations de la mortalité. Les décès par sexe et âge permettent de calculer des tables de mortalité. Ces tables fournissent l’espérance de vie à la naissance, c’est-à-dire le nombre d’années qu’un nouveau-né pourrait s’attendre à vivre, s’il devait subir toute sa vie les conditions de mortalité observées au cours de l’année. Par ailleurs, la mortalité des enfants de moins d’un an fait l’objet d’un suivi particulier. Les causes de décès sont renseignées par un médecin sur un certificat spécifique de décès et les certificats sont envoyés à l’Inserm qui code les causes de décès.
Deux séries statistiques utilisant des sources différentes sont présentées. L’Insee s’appuie sur l’exploitation des enquêtes annuelles de recensement offrant une vision globale du solde migratoire et des entrées et sorties des personnes non-immigrées ou immigrés (y compris les étrangers en situation irrégulière). L’Ined dénombre plus précisément les admissions au séjour des étrangers non ressortissants de l’Union européenne obtenant un premier titre de séjour d’une durée d’au moins un an (fichier AGDREF, ministère de l’Intérieur).
Les recensements de la population sont l’occasion de compter le nombre d’habitants qui ne sont pas nés sur le territoire. Parmi les personnes nées à l’étranger, on a coutume de distinguer les Français de naissance et les immigrés, nés avec une autre nationalité. On distingue les habitants selon leur nationalité, française ou étrangère, et, parmi les Français, les Français de naissance ou les Français par acquisition. Le recensement permet donc de connaître la nationalité actuelle ainsi que la nationalité à la naissance. Les catégories d’étrangers et d’immigrés sont différentes : les immigrés, « nés étrangers à l’étranger », peuvent être encore étrangers au recensement ou être devenus Français. Les étrangers, quant à eux, peuvent être nés à l’étranger (ils sont alors immigrés) ou nés en France (dans ce cas ils ne sont pas immigrés).
Les tableaux présentent les populations, les naissances et les décès en Europe et dans les pays développés. Ces données sont complétées par des indicateurs : taux de natalité et de mortalité, indicateur conjoncturel de fécondité et espérance de vie à la naissance.
La publication World Population Prospects fournit les estimations de population des Nations unies pour tous les pays du monde pour chaque année entre 1950 et 2020 et les projections selon différents scénarios (bas, moyen et haut) pour chaque année entre 2020 et 2100. Les chiffres présentés ici correspondent aux projections pour l’année en cours selon le scénario moyen.
Toute la population sous vos yeux : un atlas, des cartes interactives, une animation sur les migrations et des graphiques interprétés pour visualiser et comprendre les enjeux et les évolutions démographiques mondiales.
Avec le simulateur de population, les animations et les quiz, maîtriser les grands concepts démographiques, des projections aux facteurs de fécondité, devient (presque) un jeu d’enfant.
Vous croyez tout savoir sur la population ? Mesurez-vous à nos quiz.
Mise à jour : janvier 2019, sur la base des estimations de la Population mondiale des Nations Unies
Les “mémos de la démo” offrent un panorama des connaissances sur la population, dans des formats courts et accessibles à tous.
Fiches, analyses et interviews proposent un résumé de l’actualité scientifique, un décryptage des enjeux liés aux questions de population et des outils pédagogiques pour aborder les phénomènes démographiques et leurs évolutions, en France et dans le monde.
594, novembre 2021
https://doi.org/10.3917/popsoc.594.0001 
Parmi les événements qui contribuent à la dynamique démographique, les migrations internationales sont les plus difficiles à appréhender. La plupart des pays du monde ne disposent pas d’instruments permettant de produire des statistiques régulières. D’un pays à l’autre, les définitions et les méthodes de mesure peuvent varier. Depuis le début des années 2000, les organisations internationales, comme les Nations Unies ou l’Union européenne, promeuvent des approches plus standardisées qui permettent de réaliser des comparaisons. Quel que soit l’indicateur retenu, la France apparaît en Europe de l’Ouest comme l’un des pays où l’immigration est la plus faible.
Migrations internationales, étranger, immigré, émigré, flux de migrants, stock de migrants, statistiques migratoires, France, Europe
Parmi les événements qui contribuent à la dynamique démographique, les migrations sont les plus difficiles à appréhender. Au contraire des naissances ou des décès, elles font l’objet de définitions variables selon les pays et de mesures beaucoup moins standardisées, deux facteurs de confusion dans les débats publics. Cris Beauchemin, Louise Caron, Marine Haddad et Franck Temporal font le point sur le sujet et situent la France par rapport à ses voisins européens.
« Il est beaucoup plus facile, pour un responsable politique, de compter les mouvements internationaux de chaussures ou de téléphones portables que ceux d’infirmiers ou d’ouvriers du bâtiment ». Ce constat du Programme des Nations Unies pour le Développement dans son rapport annuel de 2009 demeure d’actualité. En 2018, améliorer les données sur les migrations internationales était encore affiché comme le premier objectif du Pacte mondial sur les migrations, adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies. Cet objectif vaut aussi bien pour les « stocks » que pour les « flux », selon la terminologie des démographes. Les premiers consistent en une comptabilité de la population des immigrants à un moment donné sur un territoire délimité. Plus difficiles à saisir, les seconds portent sur les mouvements et nécessitent de mesurer à la fois les entrées (ou flux d’immigration) et les sorties (ou flux d’émigration) de chaque pays.
Jusqu’au début des années 1990, les statistiques publiques françaises se sont focalisées sur les personnes étrangères, c’est-à-dire dépourvues de la nationalité française. Or, puisque les personnes nées en France ne sont pas automatiquement françaises, certains étrangers sur le territoire n’ont en réalité jamais migré. Par ailleurs, une personne immigrée peut acquérir la nationalité du pays où elle vit, et alors quitter le contingent des étrangers. Dans un souci d’amélioration de la connaissance statistique du phénomène migratoire, les dirigeants de l’Insee, de l’Ined et du Haut Conseil à l’Intégration (HCI) ont conjointement officialisé l’usage de la catégorie « immigré » en 1991 : est immigrée une personne née étrangère à l’étranger, c’est-à-dire venue s’installer en France pour un an au moins, qu’elle ait acquis ou non la nationalité française par la suite (encadré). La catégorie, reposant à la fois sur le pays de naissance et la nationalité à la naissance, permet de distinguer les rapatriés des anciennes colonies, nés à l’étranger avec la nationalité française, des autres migrants. La Division de la population des Nations Unies, qui assemble les informations de tous les pays du monde, définit quant à elle les migrants internationaux comme des personnes qui résident dans un pays différent de leur pays de naissance, quelle que soit leur nationalité actuelle ou à la naissance (encadré). Bien sûr, le décompte des migrants internationaux varie selon la définition adoptée : en 2019, au sein de l’ensemble de sa population résidente, la France compte 10 % d’immigrés selon la définition française, mais 13 % selon la définition internationale adoptée par l’ONU [1] (figure 1).
Migrant international : selon la définition internationale (ONU), individu qui réside dans un pays différent de son pays de naissance, quelles que soient sa ou ses nationalité(s). On distingue les immigrants des émigrants.
Émigrant : du point de vue de son pays de naissance, individu qui vit dans un autre pays. Ex : du point de vue de la France, une personne qui est née en France et réside en Allemagne est émigrante, quelles que soient sa ou ses nationalité(s).
Étranger : individu qui ne détient pas la nationalité du pays dans lequel il réside, qu’il y soit né ou non.
Immigrant : dans son pays de résidence, individu qui est né dans un autre pays. Ex : en France, une personne née au Canada est immigrante, quelles que soient sa ou ses nationalité(s).
Immigré : selon la définition française, individu né hors de France avec une autre nationalité que la nationalité française. Autrement dit, est immigré un individu né étranger à l’étranger.
L’avantage de la définition internationale des migrants est qu’elle permet d’établir des comparaisons entre pays. La France se situe seulement au 16e rang des pays d’immigration dans l’Europe des 28 en 2019. Malgré l’ancienneté de son immigration et les effets de la décolonisation qui lui sont spécifiques, la part des immigrés en France se situe à un niveau à peine supérieur à celui de la moyenne européenne (12 %, figure 2), loin derrière son voisin allemand (18 %). Le Luxembourg, avec près de la moitié de sa population née dans un autre pays (47 %), est un cas particulier qui illustre la diversité des situations en Europe et le fait que les petits pays accueillent souvent une proportion plus élevée de migrants que les grands pays.
Compter les immigrants n’est pas le plus difficile : il s’agit de repérer dans les recensements (ou les registres de population, dans les pays qui en sont dotés) les personnes nées à l’étranger. En revanche, compter les émigrants d’un pays (c’est-à-dire les personnes qui ont quitté son territoire, voir l’encadré) est une tâche plus ardue. C’est seulement au tournant des années 2000 que de grandes institutions internationales (Banque Mondiale, Nations Unies, OCDE) ont eu l’idée d’assembler les recensements de pays différents pour établir une statistique de l’émigration. Par exemple, pour connaître le stock des émigrants de la France, elles proposent d’additionner les personnes qui y sont nées et qui sont recensés dans tous les autres pays du monde. En pratique, l’opération est complexe : elle requiert d’assembler et d’homogénéiser des recensements du monde entier dont les définitions et les dates de réalisation peuvent varier. On peut ainsi estimer, en 2020, que pour 100 personnes nées en France, près de 4 vivent dans un pays étranger. Ce ratio, qui donne une mesure de l’intensité de l’émigration internationale, approche 6 % pour l’Italie ou la Belgique et 20 % pour le Luxembourg. La France est un pays où l’importance relative des départs est limitée par rapport à la moyenne européenne (près de 9 %)1. L’intensité de l’émigration y est cependant supérieure à ce que l’on observe dans d’autres régions du monde. En moyenne, en 2020, pour 100 personnes nées dans un pays d’Afrique, 3 ont changé de pays ; le ratio valant 2,5 % en Asie et 1,5 % en Amérique du Nord.
Comptabiliser les stocks de populations migrantes ne renseigne pas sur les mouvements de population dans le temps. Comment donc établir l’impact des entrées et sorties de migrants sur la (dé)croissance de la population d’un pays ? Il faut calculer le solde migratoire (ou migration nette), soit la différence entre les nombres de personnes entrées et sorties sur une année. Mais l’exercice est difficile, car dans la plupart des pays du monde, la mesure des flux est déficiente. En 2017, seuls 45 pays du monde avaient pu rapporter à l’ONU des statistiques sur les entrées et sorties durables (pour au moins 12 mois) de leur territoire. Dans la plupart des pays, le solde migratoire résulte donc d’une estimation indirecte. Il est déduit de l’équation démographique selon laquelle la variation de la population d’un territoire entre deux dates (la croissance démographique) résulte des différences entre les naissances et les décès (le solde naturel), et entre les entrées et les sorties (le solde migratoire). Le solde naturel étant connu grâce aux données de l’état civil, et la variation de la population grâce aux recensements successifs, on peut indirectement estimer le solde migratoire. Cependant, cette méthode résiduelle demeure imparfaite car elle intègre dans le solde migratoire les imprécisions des recensements et de l’état civil, qui – dans certains pays – est très déficient. Il est donc plus prudent de parler de « solde apparent ». Les soldes migratoires peuvent être ré-estimés plus précisément a posteriori en incluant dans l’équation démographique le solde naturel, le solde migratoire et l’ajustement dû aux imprécisions du recensement, rétablissant ainsi la cohérence entre les sources d’information statistique [2].
Les données recueillies par Eurostat auprès des instituts nationaux de statistique permettent ainsi d’approximer la contribution des migrations à la croissance démographique dans les pays de l’Union européenne. Les résultats de la figure 3 tiennent compte de premiers ajustements et sont encore susceptibles d’être réévalués. Dans la période 2010-2019, en moyenne, on estime aujourd’hui que la population de la France a crû chaque année de presque 4 personnes pour 1 000 habitants (3,7 ‰), l’essentiel de cet accroissement étant dû au mouvement naturel. Au contraire, dans les autres pays, les migrations internationales sont le principal facteur de la croissance démographique.
Comment faire la part des entrées et des sorties dans le solde migratoire ? Répondre avec exactitude à cette question est difficile dans la plupart des pays (sinon impossible dans beaucoup d’entre eux), tant les sources d’information sont rares ou lacunaires. En France, deux sources renseignent sur les flux d’immigration. Depuis que le recensement repose sur des enquêtes annuelles, il permet d’estimer le nombre des entrées grâce à des questions sur l’année d’arrivée en France et le lieu de résidence l’année précédente [3]. Cette source a théoriquement l’avantage de couvrir l’ensemble de la population résidant sur le territoire, mais certaines personnes – notamment les plus récemment arrivées – peuvent échapper aux enquêtes de recensement. Elles peuvent toutefois être comptabilisées ultérieurement lorsqu’elles sont finalement recensées. L’autre source de données est administrative et provient du ministère de l’Intérieur. L’Application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF) permet de comptabiliser chaque année les personnes qui ont obtenu un premier titre de séjour d’une durée d’au moins un an [4]. Par définition, cette statistique est partielle puisque n’y figurent pas les personnes qui ne disposent pas d’un titre de séjour. C’est le cas de la plupart des enfants qui, sauf exceptions, sont dispensés de l’obligation de ces démarches administratives. C’est aussi le cas des ressortissants de la Suisse et de l’Espace économique européen (y compris les Français de retour d’un séjour à l’étranger), alors même que ces groupes d’origine représentaient près de la moitié des arrivées en France en 2016 et 2017 [3]. Enfin, par définition, les personnes dites « sans-papiers » ne figurent pas dans AGDREF. Elles sont cependant comptabilisées lorsqu’elles sont régularisées. Au final, compte tenu de leurs propriétés, ces deux sources d’information, recensement et AGDREF, fournissent logiquement des résultats différents sur le nombre et les caractéristiques des nouveaux entrants. Par ailleurs, les différences dans les méthodes d’enregistrement peuvent conduire à des écarts dans les effectifs de populations pourtant comparables.
Les pays voisins de la France ont également une double comptabilité des flux d’immigration. Eurostat réunit la mesure des flux tels qu’enregistrés par les instituts nationaux de statistiques d‘après les recensements ou les registres de population. L’OCDE assemble, par ailleurs, les informations sur les titres de séjour pour établir des séries statistiques sur les immigrés dits « permanents », qui reçoivent un permis de résidence en principe renouvelable indéfiniment (dans les faits, le renouvellement est souvent conditionné)2. Les deux sources présentent logiquement des résultats différents (figure 4). Mais, dans tous les cas, la France est, avec l’Italie, le pays qui en proportion a reçu le moins d’immigrants en Europe de l’Ouest en 2019.
En réalité, nul ne peut dire si une entrée va – dans les faits – donner lieu à une installation permanente : bénéficier d’un droit de séjour non limité n’oblige pas à demeurer sur place. Toutefois, force est de reconnaître que la mesure des départs est très déficiente dans la plupart des pays du monde, la France ne faisant pas exception. Les appareils statistiques traduisent l’intérêt bien supérieur des États pour les individus qui entrent et résident sur leurs territoires, plutôt que pour ceux qui en sortent. Certains pays cependant, notamment en Europe du Nord, sont dotés de registres de population, qui permettent de mesurer l’émigration. En théorie, toute personne est tenue d’y déclarer non seulement son installation, mais aussi son départ. Mais souvent, en pratique, moins de la moitié des sorties sont déclarées [5]. Des données longitudinales collectées sur un échantillon représentatif de la population résidente offrent une alternative. Le principe est de suivre les individus d’un panel dans le temps et de considérer qu’une personne émigre lorsqu’elle disparaît de l’échantillon sans autre raison apparente (décès, changement d’adresse, défaut de collecte ou d’appariement). Appliquée en France grâce à un appariement partiel des recensements successifs entre 1975 et 1999, cette méthode a permis d’estimer qu’un quart à un tiers des immigrés présents à un recensement avaient quitté la métropole après un séjour de 7 à 9 ans [6]. Cette technique d’estimation n’est plus possible depuis que le recensement de la population est devenu annuel et partiel (2004). En revanche, les enquêtes annuelles de recensement permettent de déduire les sorties du territoire en soustrayant les entrées au solde migratoire. En 2017, ce sont ainsi 215 000 personnes qui auraient quitté la France, dont près des 29 % d’immigrés et 71 % de non-immigrés [3]. Constituant une avancée dans la compréhension des flux migratoires, ces calculs restent toutefois dépendants de la précision des mesures du solde et des entrées. D’autres sources administratives renseignent de façon très partielle sur les sorties du territoire. Pour les étrangers, il existe des statistiques relatives aux éloignements forcés ou aux retours aidés. Pour les Français, il s’agit des données consulaires, dont l’enregistrement demeure néanmoins facultatif et dépend fortement du calendrier électoral (les Français de l’étranger s’inscrivent dans les consulats pour voter).
On l’aura compris, les statistiques relatives aux migrations internationales sont souvent imparfaites. Si les stocks de migrants internationaux sont relativement bien connus quand les données censitaires sont disponibles, la mesure des flux d’immigration et, encore plus, d’émigration, reste limitée dans la plupart des pays du monde. En France, des progrès ont été réalisés ces dernières années, même si les estimations des flux et du solde migratoire peuvent encore être améliorées. Cependant, les statistiques disponibles permettent déjà de relativiser le rôle des migrations dans l’évolution de la population. Si la France est historiquement un pays d’accueil, elle est devenue l’un des pays d’Europe de l’Ouest où l’immigration est, en proportion, parmi les plus faibles, quelle que soit la mesure considérée. Il ne faut pas oublier, en outre, que la France est aussi un pays d’émigration. Une partie significative de ses immigrés quitte son territoire dans les années qui suivent leur arrivée et ses propres ressortissants sont de plus en plus nombreux à émigrer. Aujourd’hui, les natifs de France émigrent plus fréquemment que ceux d’Asie ou d’Afrique.
Il s’agit ici de l’Europe telle que définie dans les tableaux statistiques des Nations Unies, et non de l’Union européenne.
Dans la plupart des cas, les migrants qui reçoivent un titre de séjour permanent sont arrivés depuis plusieurs années et ont d’abord bénéficié de titres de séjour temporaires.
Parmi les événements qui contribuent à la dynamique démographique, les migrations internationales sont les plus difficiles à appréhender. La plupart des pays du monde ne disposent pas d’instruments permettant de produire des statistiques régulières. D’un pays à l’autre, les définitions et les méthodes de mesure peuvent varier. Depuis le début des années 2000, les organisations internationales, comme les Nations Unies ou l’Union européenne, promeuvent des approches plus standardisées qui permettent de réaliser des comparaisons. Quel que soit l’indicateur retenu, la France apparaît en Europe de l’Ouest comme l’un des pays où l’immigration est la plus faible. 
Cris Beauchemin
Louise Caron
Marine Haddad
Franck Temporal
Données supplémentaires
Cris Beauchemin, Louise Caron, Marine Haddad, Franck Temporal – “Migrations internationales : ce que l’on mesure (ou pas)”
Popetsoc 594, Novembre 2021

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