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Les mouvements contre la vie chère et les grèves qui ont traversé les outre-mer ces dernières années (en Guyane en 2017, à Mayotte en 2018 ou en Guadeloupe en 2021) soulignent la persistance, voire l’aggravation des fragilités économiques et sociales des territoires ultramarins.
Par  La Rédaction

Temps de lecture  11 minutes
Considérées comme des îlots de prospérité dans leurs environnements régionaux respectifs, les territoires de l’outre-mer accusent cependant un retard de développement par rapport à la France métropolitaine. Les inégalités y sont plus marquées que sur le reste du territoire national.
Longtemps enserrées dans une relation quasi-exclusive avec la métropole ou l’Union européenne, les économies ultramarines demeurent encore peu perméables à leur environnement régional.
Des écarts forts et persistants demeurent entre les outre-mer et la France métropolitaine dans le domaine socio-économique. Plusieurs rapports parlementaires publiés et des études de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) fournissent des indicateurs :
Des inégalités demeurent en matière de dépenses d’investissement pour les infrastructures de base (infrastructures de transport et d’assainissement, infrastructures électriques, logement le numérique, etc.).
Ainsi en matière d’assainissement, 56% des eaux douces sont de bonne qualité en métropole mais seulement 12% en Guyane, 23% en Guadeloupe, et 42% en Martinique. 5% des Guyanais n’ont pas accès à l’eau potable, et les coupures d’eau sont quotidiennes en Guadeloupe.
Dans le domaine de la téléphonie fixe, 72% de la population ultramarine est raccordée contre près de 100% de la population métropolitaine. 50% de la population des DOM sont raccordés à internet pour une moyenne nationale de 81%.
70 000 logements dits précaires ou indignes sont comptabilisés dans les cinq départements d’outre-mer. Ils représentent à eux seuls 13% des logements insalubres français, pour seulement 4% de la population.
Au lendemain des mouvements sociaux de 2009, les états généraux des outre-mer ont proposé des mesures contre la vie chère, pour un développement endogène et durable, contre l’illettrisme. Beaucoup de mesures préconisées restent inappliquées.
Depuis 2012, plusieurs textes législatifs (loi relative à la régulation économique outre mer de 2012, la loi relative à l’actualisation du droit des outre-Mer d’octobre 2015) ont doté l’État de nouveaux outils de régulation pour lutter contre la vie chère. Une loi sur l’égalité réelle pour l’outre-mer a été promulguée en février 2017. Elle prend la forme d’un plan de convergence entre les collectivités et l’État pour tendre vers l’égalité d’ici 20 à 30 ans.
Une étude de l’Insee publiée en 2020 confirme que les habitants des Dom et de Mayotte continuent de vivre des conditions de pauvreté plus forte qu’en métropole. Une personne sur cinq vit sous le seuil de pauvreté aux Antilles et en Guyane. Les territoires les plus durement touchés sont la Guyane et Mayotte.
Selon un rapport de la Cour des comptes publié le 24 mai 2022, les inégalités perdurent, en particulier à Mayotte et en Guyane, malgré des investissements en hausse de l’État. Le budget global alloué aux politiques publiques ultramarines s’élève à 27,3 milliards d’euros en 2021 (en augmentation de 11% par rapport à 2020). 
La crise sanitaire a aggravé la situation dans de nombreux territoires ultramarins. Selon l’Agence française de développement (AFD), l’économie de la Polynésie française a connu une dégradation jamais vue depuis les années 1960. Cela s’explique notamment par la chute de l’activité touristique. 
En revanche, un rapport du CEROM (comptes économiques rapides pour l’outre-mer) constate que l’impact économique du premier confinement sur le PIB apparaît moindre dans les DOM qu’en métropole (-18% à Mayotte, -20% à la Martinique et à la Guadeloupe, -25% en Guyane et -28% à La Réunion contre -33% de baisse d’activité en France). Cela s’explique en partie par l’importance des services non marchands, qui représentent 54% de la valeur ajoutée (par secteur) à Mayotte, entre 33% et 37% dans les autres DROM et en Polynésie française contre 22% en métropole.
Malgré la distance, la majorité des échanges commerciaux (entre 50 et 60%) se fait encore avec la métropole. Ces échanges sont singulièrement déséquilibrés. Cette situation est un héritage du système économique colonial dit de l’Exclusif : les territoires étaient soumis à une obligation de commerce exclusif avec la métropole et lui fournissaient matières premières agricoles ou minières tout en servant de débouchés à ses produits industriels.
Isolés et handicapés par leur éloignement géographique, les territoires et collectivités d’outre-mer sont logiquement freinés dans leur développement économique, industriel et social. La stratégie économique de la France dans ces territoires a longtemps été fondée sur la seule compensation des handicaps structurels par le biais d’outils d’intervention spécifiques pour soutenir la croissance et réduire les écarts de développement ou les baisses de charges sociales avec notamment :
L’éloignement de ces économies insulaires aurait dû inciter à produire sur place plutôt qu’à importer. En pratique, l’étroitesse des marchés locaux a des effets contradictoires : elle peut soit favoriser certaines entreprises par le biais du développement d’une clientèle captive, soit handicaper celles-ci compte tenu du manque de débouchés.
Les économies ultra-marines reposent, dans la plupart des collectivités territoriales, sur un nombre réduit de secteurs économiques :
La recherche d’une meilleure insertion des territoires ultramarins dans leur environnement est souvent identifiée comme un des principaux leviers de leur croissance durable, riche en emplois et garante d’effets économiques et sociaux bénéfiques (Rapport Vlody 2016).
Dans cette perspective, l’État a reconnu à toutes les collectivités d’outre-mer des compétences en matière de coopération régionale au fil du temps, même si celles-ci diffèrent légèrement d’une collectivité à l’autre. Elles peuvent adhérer à des organisations régionales. Ainsi, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie sont membres à part entière de plusieurs organisations régionales politiques, généralistes et environnementales. La Guadeloupe, la Martinique et Saint Martin ont adhéré en qualité de membre associé à l’association des États de la Caraïbe en leur nom propre. Des mécanismes de dialogue régulier sont mis en place avec les États frontaliers (entre la Guyane et le Brésil par exemple).
La loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) de 2015 a modifié la répartition des compétences entre les collectivités locales et oblige ainsi l’État à consulter systématiquement les régions ultramarines avant de conclure des accords diplomatiques ou de coopération avec les États voisins.
Le développement d’énergies durables apparaît donc comme une alternative à développer compte tenu du potentiel dont disposent ces territoires (chaleur, géothermie, vent, vague, soleil). Des investissements en ce domaine diminueraient à terme la facture énergétique acquittée. Actuellement, la grande majorité des territoires ultramarins dépend des centrales thermiques à pétrole ou à charbon, polluantes et dont le coût peut s’avérer élevé en cas de hausse du prix des énergies fossiles.
Accroître l’autonomie énergétique et développer des énergies non polluantes sont deux objectifs pour les territoires de Mayotte, La Réunion, la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane. La loi de 2015 sur la transition énergétique a inscrit l’autonomie énergétique à l’horizon 2030 pour les régions ultramarines. 
À ce jour, la production d’énergies renouvelables reste cependant marginale. Certains territoires sont plus avancés que d’autres. Ainsi, La Polynésie française est l’un des premiers territoires ultramarins à avoir mis en place une système de climatisation innovant utilisant l’eau de mer. Cette réussite a inspiré l’île de la Réunion, qui a installé deux systèmes similaires. La Guadeloupe a, quant à elle, expérimenté un projet houlomoteur (qui crée de l’électricité à partir de la houle).
Globalement, le coût des projets, les contraintes climatiques et le manque de données techniques rendent l’installation de ces projets plus complexes qu’en métropole. 
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