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EN IMAGES – Quand le plus grand récif corallien du monde affleure sous l’Océan, sur le littoral, la doyenne des forêts primaires émerge des brumes. Entre ces deux extrêmes s’exprime toute la sauvagerie du Queensland.
Penchés par-dessus le bastingage, les doigts tailladés par le fil nylon, l’estomac quelque peu remué par la houle, nous balayons les fonds de nos hameçons. «No fish, no meal»! L’avertissement lancé par la voix gouailleuse de Roy Turner claque dans le vent. «Pas de poisson, pas de repas»! Nous redoublons d’ardeur et bientôt deux énormes becs de canes malabars s’ébattent sur le pont. Roy n’en garde que les filets, pousse le bateau vers un lagon paisible, débouche une bouteille et se met aux fourneaux. Nous nous glissons dans l’eau translucide et tiède au milieu d’une forêt de cornes vert fluorescent, effleurés par les lèvres pulpeuses d’un bénitier géant, frôlés par des éventails de corail où s’active une foule de poissons multicolores. Au-dessus, l’ombre de Roy s’agite sur le pont. Cheveux en bataille, notre chef des mers hache basilic, ail, citronnelle, ajoute piments, citrons kaffir, et, victorieux, nous fait enfin signe. A peine sortis de l’eau, nous dégustons à pleines mains le produit de notre pêche: sashimis, filets vapeur et grillades de bec de cane. Le ventre plein, les papilles rompues aux multiples saveurs d’un seul et même poisson, nous bondissons à nouveau sur les flots à bord du Jojo III. Nous débarquons gorgés de soleil et d’embruns sur la petite île d’Haggerstone, le refuge de Roy et Anna depuis trente ans, notre havre pour cinq jours sur la grande barrière de corail.
Roy Turner, l’adolescent élevé dans une ferme de l’Etat de Victoria,« juste capable de tondre des moutons et de jouer de la guitare», devenu Crocodile Dundee en Nouvelle-Guinée, chantant avec son groupe, devant les Papous, puis bâtisseur d’écolodges dans les forêts du nord du Queensland, a toujours rêvé de vivre encore plus à l’écart de la civilisation, jusqu’à ce qu’il entende parler un jour d’une île, un confetti inhabité, situé à 600 kilomètres au nord de Cairns. Ronde, juchée sur un récif corallien, frangée d’une jolie plage, de mangroves et couverte d’une forêt coiffée par les vents d’ouest, Haggerstone est l’une des 900 îles et 2 000 récifs qui s’alignent parallèlement au littoral australien pour former la Grande Barrière de corail. Roy et sa femme Anna y débarquent un jour de 1985. D’une barge chargée à ras bord, ils descendent un vieux tracteur, du matériel de construction, des vivres, poules, semis, et une poignée d’amis venus leur prêter main-forte pour défricher, collecter l’eau de pluie, et ériger leur rêve. Alliant les talents de potière et de décoratrice d’Anna, à ceux de sculpteur et bâtisseur autodidacte de Roy, le couple se met au travail avec acharnement. Deux enfants et neuf ans plus tard, trois maisons de bois octogonales ouvertes sur la forêt, une vaste case au toit de paille juché sur des troncs issus d’arbres roulés par les flots de l’Océan, se dressent le long de la plage. Le potager regorge de fruits, de plantes aromatiques, de légumes, sans oublier la célèbre roquette dont Roy est si fier: «Croquer cette salade, c’est savourer un morceau de l’île», dit-il à qui veut l’entendre.
Dans le calme de son immense cuisine, Anna invente et compose de savoureuses recettes pour le bonheur des visiteurs venus partager un temps le mode de vie sans artifice de cette famille de robinsons en marge de la plus sauvage des régions australiennes, le Cape York. Nous avions découvert l’immensité et la diversité de cette péninsule tendue entre mer de Corail et mer d’Arafura, du haut de l’avion de Fred, baroudeur des airs aguerri sur le trajet d’Haggerstone. Virevoltant d’une aile sur l’autre, il nous fit tour à tour entrevoir le moutonnement des forêts tropicales d’où émergeaient de vieux sommets volcaniques, les bancs de sable plongeant sous les flots azur, des mangroves soulignant les méandres de rivières boueuses et larges, d’interminables dunes de sable blanc, des marais et des savanes… Nous avions suivi du regard la piste de latérite rouge tracée au cordeau empruntée par les aventuriers à l’assaut de la dernière frontière australienne. La très grande majorité des voyageurs visitant l’Etat du Queensland ne vont pas aussi loin vers le nord. Ils s’arrêtent à Cape Trib’. Roulant le long d’abrupts versants, la houle végétale des forêts tropicales vient se jeter ici même dans le foisonnement corallien de la Grande Barrière qui s’étire du nord au sud sur 2 400 kilomètres.
La Grande Barrière est un complexe d’îles, de lagons, de rides coralliennes, de bancs de sable frisant la surface turquoise de la mer, haché de passes et de chenaux d’eaux sombres. C’est le plus grand relief jamais construit par des êtres vivants, des colonies de milliers de polypes marins ayant trouvé là les conditions idéales à leur développement: des eaux salées mais pas trop, oscillant autour de 17 °C et suffisamment claires pour laisser passer le soleil. Haut lieu de la plongée, les touristes s’y pressent, en rangs peut-être trop serrés ; certains coraux en ont perdu leur couleur. Plus grave que la surfréquentation touristique heureusement localisée, réchauffement climatique, polluants divers, intensification du transport fluvial et de l’exploitation minière menacent à très court terme cet écosystème, au dire de l’Unesco, qui doit l’inscrire prochainement au rang de patrimoine en péril. Menacée, la forêt tropicale le fut également en son temps, sous l’avancée de l’exploitation forestière et de l’élevage.
Que resterait-il de la forêt de Daintree et de ses palmiers éventails aux ombrelles vernissées si les écologistes des années 80 ne s’étaient battus corps et âme et n’avaient sensibilisé l’opinion publique? Les touristes ont depuis remplacé bulldozers et tronçonneuses. Et Daintree est devenue le site le plus visité du continent australien. Relique de l’ère secondaire, quand le pays tout entier était boisé, la doyenne des forêts primaires – entre 125 et 200 millions d’années – s’étire en un corridor morcelé par l’agriculture de Cooktown au nord à Mackay, grimpe à l’assaut des plateaux d’Atherton où elle s’effiloche entre nuages et brumes. Sur l’ensemble des Parcs nationaux, forêts d’Etat, réserves aborigènes la protégeant ainsi que forêts humides, forêts sèches, marais bruissant d’oiseaux, mangroves aux racines s’arque-boutant dans la vase sombre, l’Unesco a posé son label: Tropiques Humides du Queensland, qui reconnaît la grande richesse et l’interdépendance de tous ces écosystèmes.
Les espèces endémiques y sont légion, comme le casoar, oiseau aptère indispensable aux arbres dont il assure la dissémination des graines. Frisant des plages magnifiques et interminables, l’océan fréquenté par des crocodiles d’estuaire et des méduses venimeuses ne permet guère de baignade en toute quiétude. Il faut alors se faufiler à l’intérieur des terres, au milieu d’arbres gigantesques appuyés sur leurs racines contreforts, se couler dans le lit des rivières comme celle de Mossman, dont les eaux translucides et fraîches ont poli d’énormes blocs de granit, et se laisser porter par la magie de la forêt des brumes.
Ambassade d’Australie (01.40.59.33.06 ; www.france.embassy.gov.au). Office de tourisme du Queensland (www.queensland-australia.eu, version en français). Meilleure saison: idéal d’avril à octobre, en mer particulièrement. De novembre à mars, saison chaude et pluvieuse mais forêts superbes, vent calme sur une mer chaude (attention aux méduses venimeuses).
Avec Qantas ( 0.811.980.002 ; www.qantas.com.au), aller-retour Paris-Cairns via Dubaï et Sydney à partir de 1 250 €. En partenariat avec la compagnie Emirates, Qantas propose des vols quotidiens depuis Paris, Nice et Lyon à bord d’un A380. Entre Dubaï et Sydney, la classe Premium Economy, avec espace et confort optimisés, permet d’atténuer la fatigue d’un voyage lointain. Avec le Walkabout Pass, tarifs avantageux pour se rendre dans plus de 50 destinations en Australie. Avec un voyagiste: Voyageurs du Monde (01.42.86. 16.99 ; www.voyageursdumonde.fr) pour sa «Traversée du Queensland».
A Cairns: Novotel Cairns Oasis Resort (00.617.4080.1888 ; www.novotelcairnsresort.com.­ au).­ Chambres spacieuses, piscine, jardins, barbecue, spa et accueil agréable pour ce Novotel, central et paisible. A partir de 115 € avec petit déjeuner. A Airlie Beach (port de départ des îles Whitsunday): Marina Shores (00.617.4964.1500 ; www.marinashores.com.au). Dans une jolie station balnéaire, des appartements lumineux et tout équipés ouverts sur les eaux turquoise de la mer de Corail. Une halte idéale sur le littoral pour se rendre sur les Whitsunday Islands. A partir de 195 € en appartement d’une chambre. Au large: Haggerstone Island (00.617.40.603.399 ; www.haggerstoneisland.com.au). A 600 km au nord de Cairns. Accessible par avion puis bateau (740 € l’aller-retour). 600 € par personne en pension complète avec activités.
A Cairns, au 62c Shields Street, le Bellocale ( 00.617.40.517.777 ). Une cuisine italienne rehaussée d’une touche asiatique. Sublimes risottos. A partir de 18 €.
Si vous séjournez sur Hamilton Island (liste des hébergements: www.hamiltonisland.com.au), dans l’archipel des Whitsunday, offrez- vous un survol en milieu de journée au-dessus des sables de Hill Inlet, de Whitehaven Beach, et des festons orangés du récif corallien de Hardy. Avec Air Whitsunday (00. 618. 86. 707. 962 ; www.wrightsair.com.au): panorama tour, 335 €/personne.
Silky Oaks Lodge, Healing Waters Spa (00.617.40.981.666 ; www.silkyoakslodge.com.au). Alors que la jolie rivière Mossman, au sud du Parc national de Daintree, est devenue un lieu (trop) fréquenté, le lodge de Silky Oaks, situé en aval des gorges, permet de sillonner la rivière entre forêt pluviale et blocs de granit en canoë, à pied ou à la nage. Jolis bungalows dans les arbres. Son restaurant, ouvert sur la jungle et la rivière, est l’une des bonnes tables du Queensland. A partir de 280 € pour deux avec petits déjeuners (2 nuits minimum).
L’apparition silencieuse d’un casoar dont la corne bleutée, le jabot rouge vif, puis le corps énorme, émergent de la forêt dans un silence absolu.
Le nombre d’équipements touristiques en tout genre sur la route de Daintree à Cape Tribulation et à Mossman Gorge.
Australie, Guide Lonely Planet, 2012. Queensland & the Great Barrier Reef, Guide Lonely Planet (en anglais), 2011. Nos voisins du dessous. Chroniques australiennes, de Bill Bryson, Payot Voyageurs 2003. Quand une plume caustique sillonne l’Australie pour aborder les thèmes les plus divers: faune, histoire, etc.
Sanglier Intrépide
le
Euh… Les zouzous… Vous saviez que le gouvernement australien envisageait de nuire sérieusement à la Grande Barrière de corail en y accordant une concession à une entreprise de forage pétrolier? Rêvez bien devant ces images. Parce que l’argent sera bientôt plus important. Pragmatisme libéral oblige.
Le__Suisse
le
Magnifique Oo Ca donne envie!
Albert D. 2
le
Quel magnifique voyage en images, merci à l’auteur pour ce dépaysement, surtout en ce mois d’octobre français.
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HUMEUR – Main dans la main, l’État, les régions et la compagnie font tout pour compliquer la vie des passagers. Preuve par l’exemple avec un voyage Paris, Nîmes, Alès, Montpellier, Tournemire et retour. Édifiant !
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L’Australie par-delà la Grande barrière de corail
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